(Québec) La session parlementaire qui s’achève a été difficile pour la Coalition avenir Québec (CAQ) de François Legault, qui a échoué sur le plan de la transparence et de l’éthique, estiment les partis d’opposition.

Ils ont tenu des points de presse séparés à l’Assemblée nationale vendredi, afin de dresser le bilan des trois derniers mois en politique, comme le veut la tradition avant les Fêtes.

Selon Québec solidaire (QS), la session se termine comme elle a commencé : avec des « bourdes éthiques monumentales » de la part d’un ministre clé de la CAQ, le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon.

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Gabriel Nadeau-Dubois

« On n’a jamais vu un ministre démontrer autant de dédain pour les règles éthiques », a déclaré le porte-parole de QS, Gabriel Nadeau-Dubois.

« Les Québécois ne pardonneront ni à M. Fitzgibbon ni à M. Legault qui le défend et qui semble avoir largué tous ses principes par-dessus bord. »

« Le comportement du ministre de l’Économie est inexcusable, la caution du premier ministre, inexplicable », a ajouté la cheffe du Parti libéral du Québec (PLQ), Dominique Anglade.

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Pierre Fitzgibbon

À la fin août, M. Fitzgibbon s’était dit prêt à monnayer les données médicales des Québécois pour attirer les investissements des pharmaceutiques.

Il a ensuite été blâmé deux fois plutôt qu’une par la Commissaire à l’éthique pour divers manquements reliés à ses participations dans des entreprises, du jamais vu.

François Legault, qui dans l’opposition prônait la « tolérance zéro » en matière d’éthique, a défendu bec et ongles son ministre, qui a toujours agi de bonne foi, selon lui.

Les Québécois ne lui pardonneront pas cette éthique élastique, a martelé M. Nadeau-Dubois, qui estime que M. Fitzgibbon fait face à un choix : soit il respecte les règles, soit il quitte la politique.

« Ce qu’on sent aujourd’hui, c’est la vieille odeur du copinage qui revient en politique québécoise. La boussole morale, éthique des députés de la CAQ est complètement détraquée. »

D’ailleurs, la popularité de la CAQ « s’égraine » depuis quelques mois, comme en témoignent les sondages, selon QS. « Les scandales de M. Fitzgibbon, les Québécois, ils haïssent ça », a déclaré Manon Massé.

Jeudi, un sondage Angus-Reid a suggéré que la CAQ avait perdu 13 points depuis le mois de mai dans les intentions de vote.

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Paul St-Pierre Plamondon

« Cette personne-là (Pierre Fitzgibbon) n’est pas faite pour faire de la politique », a renchéri le chef du Parti québécois (PQ), Paul St-Pierre Plamondon.

Gestion opaque

Le PQ accuse également la CAQ de gérer la pandémie de la COVID-19 de manière « opaque » en ne partageant pas toute l’information.

Par exemple, les restaurateurs ont été fâchés d’apprendre cette semaine que la santé publique n’a jamais recommandé la fermeture des salles à manger en zone rouge.

Les péquistes disent avoir proposé, en vain, plusieurs solutions pour lever l’opacité et améliorer l’adhésion de la population aux consignes sanitaires.

Cela inclut l’ajout d’un scientifique dans la cellule de crise du premier ministre, la séparation des points de presse du gouvernement et de la santé publique, et la publication des avis de la santé publique.

Les oppositions réclament aussi des rencontres hebdomadaires avec le premier ministre jusqu’à ce que l’Assemblée reprenne ses travaux, le 2 février 2021. M. Legault a acquiescé à cette demande vendredi.

M. St-Pierre Plamondon se désole par-dessus tout de n’avoir pu convaincre le gouvernement de déclencher une commission d’enquête publique indépendante sur la pandémie.

« À date, on ne l’a pas obtenu, a-t-il affirmé. Je vous dis, soyez patients, parce que la joute n’est pas totalement terminée. »

Le PQ déplore en outre l’absence d’aide directe pour les restaurateurs, ainsi que le manque d’empressement du gouvernement pour adopter un projet de loi qui leur apportera un peu d’air.

Le projet de loi 72, qui assouplit les règles pour la vente d’alcool, entre autres, cheminait toujours à l’Assemblée nationale vendredi après-midi. Il sera vraisemblablement adopté in extremis.

Aucun gain face à Ottawa

Enfin, le gouvernement Legault a échoué, disent les oppositions, à obtenir d’Ottawa les transferts en santé sur lesquels il dépend pour équilibrer son budget.

M. Legault réclame que la contribution d’Ottawa au financement de la santé passe de 22 à 35 %, ce qui représenterait 28 milliards supplémentaires à partager entre les provinces chaque année.

« Ça n’aura pas lieu », a prédit M. St-Pierre Plamondon, qui demande que l’on refasse la mise à jour économique « pour qu’on comprenne c’est quoi, le plan […] et que ça ne soit pas basé sur des lubies ».

Québec a été « très jovialiste dans la manière de considérer les revenus », signale à son tour Dominique Anglade. « Le (problème du) financement de la santé, il reste entier. »