(Québec) Le gouvernement Legault relance le Plan Nord cher à l’ex-premier ministre Jean Charest, mais dans une version beaucoup plus modeste.

Il promet d’y injecter 778 millions en trois ans, l’essentiel des sommes étant réservé à accroître l’accès au territoire situé au nord du 49e parallèle par la construction ou la mise à niveau d’infrastructures, au premier chef des routes.

Une dizaine d’années après celui des libéraux, le Plan Nord du gouvernement caquiste devient le « Plan d’action nordique » et s’inscrit dans la lignée du précédent, en visant à donner un meilleur accès aux ressources minières.

On verra notamment à poursuivre la construction et la prolongation de routes (la 138 et la 389), ce qui facilitera le transport de marchandises, à étendre l’accès à la fosse du Labrador, de même qu’à poursuivre le développement des infrastructures portuaires et ferroviaires de Pointe-Noire, à Sept-Îles, vers lesquelles convergent des tonnes de minerais.

Au total, Québec prévoit que les investissements dans le Nord s’élèveront à 1,4 milliard d’ici trois ans, avec le soutien prévu du gouvernement fédéral.

L’annonce a été faite lundi en conférence de presse par le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Jonatan Julien, entouré du ministre des Affaires autochtones, Ian Lafrenière, et du ministre des Forêts, Pierre Dufour.

Au total, le plan comporte 49 projets, incluant des initiatives de développement touristique et des plans d’amélioration des conditions de vie des communautés qui habitent le territoire nordique.

Mais pour l’essentiel, on parle de développement d’infrastructures. « Sur le 1,4 milliard, il y a 1,3 milliard lié à des infrastructures », a reconnu le ministre Julien, tout en soutenant que les minières n’en seront pas les seules bénéficiaires.

« Parlons pas de développement économique. Parlons de développement socio-économique. Le développement social est primordial », a-t-il dit, en donnant l’exemple du prolongement de la route 138, qui assurera le développement de la « qualité de vie » de la population de la Côte-Nord.

Le Plan d’action nordique 2020-2023 semble être une pâle copie de l’ambitieux Plan Nord annoncé en grande pompe par l’ex-premier ministre Jean Charest en 2011.

À l’origine, il y a une dizaine d’années, le Plan Nord devait être un mégaprojet s’étirant sur 25 ans. Il allait générer des investissements privés et publics de plus de 80 milliards et devenir la locomotive économique du Québec, gage de prospérité pour les générations à venir, notamment grâce aux redevances minières. On prévoyait alors créer ou maintenir 20 000 emplois par année et générer 14 milliards de retombées dans les coffres de l’État.

Le ballon s’était vite dégonflé avec la chute marquée de la valeur des minéraux.

Déjà, en 2015, le premier ministre Philippe Couillard avait présenté une version modifiée du Plan Nord, également plus modeste, sur cinq ans.

Habiter le Nord

L’approche caquiste est différente de celle de ses prédécesseurs, se voulant plus terre à terre et à court terme.

En 2011, le premier ministre Charest « a mis le Nord sur la carte », et « en termes de marketing, c’était très fort », reconnaît le ministre Julien, en faisant valoir que son plan à lui a le mérite d’être « beaucoup plus précis, beaucoup plus concret », avec des objectifs peut-être plus modestes, mais mesurables.

« Mais c’est la même volonté d’occuper le nord du Québec », a-t-il ajouté.

Il insiste aussi pour dire que l’ensemble des mesures a été élaboré en partenariat avec le milieu, dont les élus des municipalités nordiques et les chefs autochtones.

L’Union des municipalités du Québec (UMQ) s’est réjouie du plan consacré à une vaste région qui a « des défis majeurs à relever, notamment en matière de transport et de désenclavement, de télécommunication et d’habitation ».

« En misant sur des mesures pour habiter le Nord, on devrait tendre vers une diminution du phénomène “fly in/fly out”, lequel ne permet pas à la région de se développer à son plein potentiel. Le fait d’impliquer les gens qui habitent le territoire dans le développement du Nord est garant d’une meilleure collaboration avec le reste du Québec et les retombées n’en seront que plus durables », a estimé le président du caucus régional de la Côte-Nord de l’UMQ et maire de Sept-Îles, Réjean Porlier, dans un communiqué.

L’Association minière du Québec a exprimé son appui à la stratégie visant à « habiter davantage le Nord ». « La préoccupation envers l’embauche locale étant fortement ancrée chez les sociétés minières, si le Plan d’action nordique permet d’attirer et de former encore plus de travailleurs qualifiés dans le Nord, il ne fait aucun doute que l’industrie minière se tournera vers eux », a indiqué l’organisation par communiqué.

La Société pour la nature et les parcs (SNAP Québec) a déploré que le plan présenté lundi ne s’attarde pas aux aires protégées autochtones, aux solutions pour le climat et au rétablissement du caribou forestier et migrateur. « Un rendez-vous manqué avec la conservation », a déploré l’organisme sur Twitter.