(Ottawa) L’organisme Amnistie internationale dénonce la décision du gouvernement Legault de déléguer un observateur, et non pas une ministre, à la rencontre fédérale-provinciale de deux jours portant sur les droits de la personne, qui prend fin mardi.

Cette rencontre virtuelle est en préparation depuis des mois et vise à faire le point sur les enjeux entourant la défense des droits de la personne et le racisme au pays.

Alors que quatre ministres du gouvernement Trudeau participent à cette rencontre, et que d’autres provinces sont représentées par des ministres, le Québec y a délégué la sous-ministre du ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration, et non pas la ministre Nadine Girault.

Amnistie internationale soutient que le premier ministre du Québec François Legault a refusé que la ministre Girault participe à la rencontre à cause de son refus de reconnaître l’existence du racisme systémique au Québec.

« À cause de son déni du racisme systémique, le gouvernement du Québec se retire complètement de cette rencontre qui représente une occasion unique pour l’ensemble des ministres responsables des droits humains au Canada de se concerter et d’agir, comme si aucun des enjeux n’avait de réelle importance pour le Québec, pas même les droits des peuples autochtones. C’est vraiment gênant, voire honteux », a affirmé France-Isabelle Langlois, directrice générale d’Amnistie internationale Canada francophone, dans un communiqué de presse.

Selon l’organisme, cette rencontre est pourtant « primordiale » alors que le Canada fait face à des défis « considérables » en matière de droits de la personne.

À l’issue de cette rencontre, il est prévu que les participants rédigent un communiqué de presse reconnaissant l’urgence d’agir sur le racisme systémique.

« Amnistie internationale demande au gouvernement du Québec de revoir sa position et de participer activement à cette rencontre sur les droits humains, et l’invite à enfin reconnaître qu’il y a bel et bien du racisme systémique au Québec », a affirmé Mme Langlois.

Au cabinet de Mme Girault, une porte-parole, Flore Bouchon, a indiqué que le Québec n’est pas la seule province à avoir délégué un représentant administratif à la rencontre.

« Dès la réception de l’invitation à la conférence, il fut déterminé que le Québec serait représenté par un représentant administratif et qu’il agirait à titre d’observateur. D’autres provinces seront également observatrices à cette conférence, soit l’Alberta et la Saskatchewan. En plus des provinces observatrices, le Manitoba, Terre-Neuve-et-Labrador, le Nouveau-Brunswick et le Nunavut ont envoyé des représentants administratifs », a indiqué Mme Bouchon dans un courriel à La Presse.

« Le Québec agit de manière autonome sur son territoire et à l’international, particulièrement en matière de défense des droits de la personne. Il dispose de nombreux programmes, politiques et mesures au bénéfice des personnes âgées, des personnes handicapées, des femmes et des enfants, des communautés autochtones et des personnes de minorités culturelles », a-t-elle ajouté.

Mme Bouchon a aussi fait valoir que le gouvernement du Québec avait mis sur pied, en 2018, un comité interministériel sur les droits de la personne.

À Ottawa, on juge aussi cette décision de Québec inacceptable. « Même le gouvernement de la Colombie-Britannique, une province où on vient d’avoir une élection, a jugé opportun qu’une ministre participe à la rencontre », a-t-on indiqué en coulisses.

Les quatre ministres du gouvernement Trudeau qui participent à la rencontre sont le ministre de la Justice, David Lametti, le ministre des Affaires étrangères, François-Philippe Champagne, le ministre du Patrimoine, Steven Guilbeault, et la ministre de la Jeunesse et de l’Inclusion, Bardish Chagger.

Le gouvernement Trudeau a décidé de réactiver cette rencontre fédérale-provinciale sur les droits de la personne en 2017 après de nombreuses années sans réunion sous les précédents gouvernements.

« Nous savons que les enjeux entourant la défense des droits humains n’ont pas pris congé et n’ont pas arrêté d’exister avec la pandémie, au contraire. C’est pourquoi il est question des droits humains en contexte de pandémie, d’une relance équitable, ainsi que des mesures pour éliminer le racisme systémique et favoriser l’inclusion », a fait valoir le ministre du Patrimoine Steven Guilbeault.

« Ce sommet veut mettre de l’avant ce que le Canada peut accomplir quand les provinces, les territoires, les partenaires autochtones et la société civile se réunissent pour traiter de sujets qui nous rassemblent, au lieu de nos divisions. Nous restons déterminés à en faire un rendez-vous régulier, de l’inscrire dans la durabilité, de fournir un suivi sur les engagements et de permettre aux différentes voix de s’exprimer », a-t-il ajouté.