(Montréal) Le premier ministre canadien Justin Trudeau a appelé Washington à refuser tout accord commercial avec Pékin s’il ne prévoit pas la libération des deux Canadiens détenus par la Chine, laquelle a pointé vendredi la « responsabilité » d’Ottawa.

Michael Kovrig, un ancien diplomate, et le consultant et homme d’affaires Michael Spavor, spécialiste de la Corée du Nord, avaient été arrêtés le 10 décembre 2018 par la police chinoise. Ils sont depuis incarcérés.

La procédure visant les deux Canadiens est largement perçue dans leur pays comme une mesure de représailles à l’arrestation à Vancouver quelques jours plus tôt d’une dirigeante du géant des télécoms Huawei, Meng Wanzhou, à la demande des États-Unis. Ottawa juge leur détention « arbitraire ».

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Un manifestant réclame la libération de Michael Kovrig et Michael Spavor lors d'un rassemblement à Vancouver en mars dernier.

Interrogé jeudi pour savoir si un accord commercial Pékin-Washington pouvait débloquer la situation, M. Trudeau a répondu « on l’espère », lors d’un entretien à la chaîne québécoise francophone TVA.

« On leur dit qu’il ne faudrait pas que les États-Unis signent une entente finale et complète avec la Chine qui ne règle pas la question de Meng Wanzhou et des deux Canadiens », a ajouté le premier ministre.

Interrogé sur le sujet, un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères a indiqué vendredi que la « situation difficile » des relations sino-canadiennes était « entièrement de la responsabilité » d’Ottawa.

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Meng Wanzhou avait été libérée sous caution à Vancouver quelques jours après son arrestation.

Le Canada « devrait immédiatement libérer Mme Meng Wanzhou et lui permettre de retourner en Chine en toute sérénité », a indiqué Geng Shuang lors d’une conférence de presse.

Il n’a pas précisé si Washington avait demandé à Pékin de relâcher les deux Canadiens, mais a appelé Ottawa à ne pas « se liguer » avec d’autres pays afin de mettre la pression sur le gouvernement chinois.

« En tirant les marrons du feu pour les autres, on finit toujours par se brûler soi-même », a souligné Geng Shuang, utilisant une expression imagée qui désigne le fait d’accomplir un dur travail au profit d’autrui.

Réagissant à ces propos, le ministre canadien des Affaires étrangères François-Philippe Champagne a haussé le ton. « Le seul qui va dicter la politique étrangère du Canada est le gouvernement du Canada », a-t-il répliqué dans une interview à la chaîne anglophone CBC.

M. Trudeau, critiqué par l’opposition pour sa gestion du dossier, a assuré que son gouvernement travaillait « quasiment tous les jours pour essayer de faire comprendre aux Chinois qu’il faut qu’ils libèrent ces deux Canadiens ».

« Quelle que soit la pression qu’ils mettent sur nous, ce n’est pas en arrêtant deux Canadiens… Ça ne va pas changer la décision de la Cour en Colombie-Britannique par rapport à un traité d’extradition », a-t-il prévenu, rappelant que le système judiciaire canadien était « indépendant ».

Meng Wanzhou avait été libérée sous caution à Vancouver quelques jours après son arrestation. L’audience sur la demande d’extradition des États-Unis à son encontre doit débuter le 20 janvier.