(Ottawa) La grogne suscitée par la position du Parti vert du Canada sur l’utilisation des sables bitumineux prend de l’ampleur hors Québec.

Après avoir critiqué la chef Elizabeth May sur les réseaux sociaux, le chef des verts québécois, Alex Tyrrell, lance une pétition dans laquelle il demande à Mme May de prendre une « position claire » contre les sables bitumineux de l’Alberta.

En entrevue avec La Presse canadienne, M. Tyrrell soutient que les verts doivent tenir un discours plus cohérent, alors que leur parti connaît une poussée dans les sondages et que leurs positions sont davantage scrutées.

« Je ne veux pas voir Mme May aller au débat des chefs et faire la promotion du pétrole albertain et de la continuité des sables bitumineux pour un autre 30, 40 ans », lance-t-il.

Dans son plan d’action climatique intitulé « Mission possible », le Parti vert du Canada promet de « mettre fin à toute importation de pétrole étranger », tout en abaissant de façon importante la consommation de combustibles fossiles.

Le parti promet également d’autoriser des investissements dans les usines de traitement « pour transformer le bitume solide en essence, diesel, propane et d’autres produits pour le marché canadien, procurant ainsi des emplois en Alberta ».

L’objectif est de réduire les gaz à effet de serre de 60 % par rapport aux niveaux de 2005 d’ici 2030 et d’atteindre zéro émission d’ici 2050.

Cassandra Romyn, qui est une candidate verte aux prochaines élections dans la circonscription de Sturgeon River-Parkland, en Alberta, croit que le fait d’utiliser le pétrole canadien aurait été une bonne idée il y a une décennie ou deux. Mais il est trop tard maintenant alors que l’urgence climatique est à nos portes, dit-elle.

« À ce stade aussi tardif, ça me semble ridicule d’investir dans une industrie qui est en train de mourir », affirme Mme Romyn, qui admet que cette position du parti a choqué plusieurs environnementalistes de sa province d’origine.

Shawn Netyo, qui est chef du Parti vert de la Saskatchewan et candidat aux prochaines élections dans Saskatoon-Ouest, est un peu plus prudent dans ses commentaires.

Il se dit satisfait du plan présenté par le Parti vert du Canada, mais laisse tomber qu’il aurait aimé voir une approche plus « innovatrice » et « ambitieuse ». C’est pourquoi il a décidé de se ranger derrière l’initiative de M. Tyrrell.

M. Netyo croit que le débat qui s’opère à l’heure actuelle est « très sain ». « C’est la manière de fonctionner des verts, dit-il. C’est comme ça qu’on opère. On est un parti qui écoute sa base avant tout. »

Or, la plus récente sortie de M. Tyrrell ne passe pas comme une lettre à la poste. De nombreux militants l’accusent de vouloir diviser le mouvement à moins de quatre mois des élections.

« Ce n’est pas moi qui est en train de diviser les troupes, se défend-il. Ce qui est en train de diviser les troupes, c’est un Parti vert qui se pose comme un grand défenseur de l’environnement qui prend des positions en appui aux sables bitumineux. »

M. Tyrrell ajoute que ça fait « très longtemps » qu’il tente de changer cette position-là à l’interne, mais qu’il se heurte à une porte fermée de la part des instances du parti.

À son avis, l’heure est venue pour les verts canadiens de prendre une position plus « radicale », afin de s’arrimer avec la montée de la conscience environnementale au sein de la population.

« Si on n’arrive pas à cette position-là avant les élections, ça va faire encore plus de dommages », prévient-il.