(Québec) L’opposition libérale craint un choc tarifaire dans quatre ans si le gouvernement Legault rembourse les trop-perçus d’Hydro-Québec en gelant les tarifs.

C’est ce qu’a fait valoir le député Gaétan Barrette, mardi, après avoir appris dans La Presse que le gouvernement déposera un projet de loi mercredi pour suspendre les pouvoirs de la Régie de l’énergie, geler les tarifs d’électricité et redonner aux abonnés d’Hydro-Québec environ 1,5 milliard.

« Ce n’est pas un remboursement comme tel, a-t-il commencé. Si c’était un remboursement, ils enverraient un chèque aux citoyens. »

« On nous annonce essentiellement dans quatre ans une hausse brutale du taux (d’électricité) qui est chargé aux citoyens », a-t-il ajouté, en accusant la Coalition avenir Québec (CAQ) d’essayer de se sortir d’affaire en choisissant « le pire chemin ».

Selon l’élu libéral, le gouvernement doit aller piger dans ses propres surplus. « Quand on a 7 milliards de surplus et qu’on a 1,5 milliard à rembourser, c’est faisable. […] Il y avait d’autres manières de faire ça, ils ont pris une manière qui va poser des problèmes. »

Il craint qu’une ponction de 1,5 milliard dans les revenus d’Hydro-Québec n’entraîne une baisse de services pour la population. « Il n’y a pas de magie là-dedans : Hydro-Québec, c’est un générateur de revenus du gouvernement, on baisse ce revenu-là, il va être compensé comment ? Une baisse de services ? On va absorber quoi, comment ? »

Les trop-perçus représentent l’écart entre le rendement autorisé par la Régie de l’énergie et le rendement réel réalisé par Hydro-Québec.

Dans l’opposition, la CAQ avait exigé le remboursement complet des trop-perçus, estimant qu’ils correspondaient à une « taxe déguisée ». Une fois au pouvoir, elle n’en a rien fait.

La pression populaire n’a cessé d’augmenter depuis ; le mois dernier, la Fédération canadienne des contribuables a remis au gouvernement une pétition de 75 000 noms.

« Opération politique »

Par ailleurs, les libéraux disent ne pas s’étonner que cette « opération politique » survienne à la toute fin de la session parlementaire. Ils décodent là une façon pour le gouvernement de marquer des points auprès des Québécois à la veille de la saison estivale.

« Il y a de la communication gouvernementale là-dedans, c’est sûr », a renchéri le chef intérimaire du Parti québécois, Pascal Bérubé, qui s’est réjoui, mardi, du « recul » du gouvernement.

Le premier ministre François Legault s’est défendu de reculer sous la pression. « Ce que j’ai dit, et ce que je suis prêt à répéter aujourd’hui, c’est que pendant toute la campagne électorale, je n’ai jamais promis de rembourser 1,5 milliard d’argent d’Hydro-Québec », a-t-il déclaré en mêlée de presse.

« Mais je suis bien conscient qu’il y a des gens, à cause du travail qui avait été fait dans l’opposition, qui ont peut-être pu interpréter et être choqué du fait qu’Hydro-Québec a augmenté ses tarifs de plus que l’inflation durant les deux premières années du gouvernement libéral », a-t-il ajouté.

De son côté, le co-porte-parole de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, a affirmé qu’il était trop tôt pour crier victoire « et dire que les gens vont voir la totalité de l’argent qu’ils ont versé en trop à Hydro-Québec ».

Dans une entrevue récente à La Presse canadienne, le président d’Hydro-Québec, Éric Martel, rappelait que le 1,5 milliard n’est plus dans les coffres d’Hydro, mais bien dans ceux du gouvernement.

Il a également mis en garde les caquistes contre le danger de demander un trop grand effort à Hydro-Québec. Plus de 70 % de ses équipements ont passé la moitié de leur vie utile, avait-il souligné.

Hydro-Québec n’a pas voulu commenter mardi, car le projet de loi n’a pas encore été déposé à l’Assemblée nationale.