(Québec) Il y aura «un avant-Granby et un après-Granby» a affirmé François Legault, jeudi, lorsqu’il a lancé la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse.

Après plusieurs jours de tractations en coulisses, le premier ministre et des représentants des trois partis de l’opposition ont présenté un front uni pour marquer la création du comité, qui sera présidé par l’ex-syndicaliste Régine Laurent.

«Ce que je souhaite en terminant, c’est qu’il y ait un peu comme un avant-Granby et un après-Granby, donc que tout le Québec se dise que dorénavant, on va faire les choses autrement», a résumé M. Legault.

La mort tragique d’une fillette de 7 ans dans cette ville de la Montérégie a provoqué une onde de choc à la fin avril. L’enfant, qui était suivie depuis des années par la DPJ, a été trouvée ligotée dans la maison familiale. Son père et sa belle-mère ont été arrêtés.

Quelques jours plus tard, les parlementaires de l’Assemblée nationale ont convenu à l’unanimité de lancer une commission spéciale. Selon le premier ministre, il est clair qu’un ménage s’impose.

«Ce n’était pas la première fois au Québec que le réseau qui doit protéger nos jeunes l’échappait, a noté M. Legault jeudi. Et je pense qu’on est rendus à une étape où on doit revoir complètement le réseau d’aide et de supports de toutes sortes pour nos enfants et nos jeunes.»

La Commission aura le mandat de scruter l’organisation et le financement de la DPJ, le cadre légal qui entoure la protection de la jeunesse, ainsi que les services sociaux et policiers.

Régine Laurent, une ex-infirmière, n’a jamais travaillé avec les enfants dans sa pratique. Elle a assuré que cela lui permettra d’aborder l’enjeu de la protection des jeunes avec «un regard neuf».

Elle a aussi assuré que l’exercice n’aura aucune visée partisane. Et ce, même si certains ont avancé que la réforme de l’ex-ministre Gaétan Barrette ait pu jouer un rôle dans le sort tragique de la fillette de Granby.

«La commission n’est pas là pour faire le procès de qui que ce soit, de quoi que ce soit», a-t-elle assuré.

Elle cherchera plutôt à poser le «bon diagnostic» pour améliorer le sort des enfants, a indiqué l’ex-présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec.

Naissance «difficile»

Au cours des derniers jours, La Presse a révélé que les pourparlers entourant la mise sur pied de la Commission ont tourné au bras de fer entre le gouvernement et les partis de l’opposition. En outre, ces derniers ont été irrités par la nomination sans consultation de Mme Laurent comme présidente.

La députée du Parti libéral, Hélène David, a fait une allusion claire à ces tractations pendant la conférence de presse.

«C’a été un peu difficile dans les débuts de mettre au monde ce processus, mais nous avons réussi», a-t-elle noté.

Elle a cependant minimisé l’importance des désaccords des derniers jours et souligné le caractère nouveau de la commission parlementaire.

Le député de Québec solidaire Sol Zanetti et la députée du Parti québécois Lorraine Richard ont abondé dans le même sens.

M. Legault s’est dit confiant que les parlementaires des différents horizons politiques parviendront à travailler de manière harmonieuse, étant donné l’importance de l’enjeu.

«On n’a pas le droit de manquer notre coup, a dit le premier ministre. On pense aux enfants, on est ici pour les enfants. Donc je suis très confiant qu’on va bien travailler, les quatre partis ensemble.»

La présidente Régine Laurent sera épaulée par deux vice-présidents, André Lebon et Michel Rivard. Avec les députés, ils désigneront bientôt cinq experts pour appuyer leurs travaux.

Dans une récente entrevue à La Presse, M. Lebon a soutenu qu’une augmentation importante des signalements à la DPJ a eu lieu ces dernières années, conséquence de services de première lignes atrophiés, notamment dans les CLSC.