(Québec) Cinq ans après avoir relevé des problèmes de gestion au Fonds vert, le Commissaire au développement durable constate que rien n’a changé, mais refuse d’enquêter davantage.

L’opposition envisage toutefois de le forcer par « ordre de l’Assemblée nationale » à « faire le ménage ».

Le commissaire Paul Lanoie a déploré jeudi que le Conseil de gestion du Fonds vert (CGFV) et le ministère de l’Environnement se disputent sur leur rôle et leurs responsabilités dans l’administration de ces centaines de millions destinés à lutter contre les changements climatiques.

Dans son rapport déposé jeudi matin, M. Lanoie en conclut que le Fonds vert ne peut ainsi jouer pleinement son rôle dans la transition écologique.

« Le Fonds vert pourrait être un outil de développement durable très puissant, a-t-il déclaré en conférence de presse. Pour l’instant, on peut dire qu’il ne joue pas encore ce rôle-là. »

Le Commissaire a refusé la requête des parlementaires qui lui demandaient de faire une évaluation complète de la révision du fonds et reporte sa prochaine vérification au moins jusqu’en 2021.

« Il semble y avoir des disputes concernant les rôles et responsabilités des deux intervenants majeurs. Donc, on va leur donner le temps de résoudre ça. »

Du même souffle, il constate que la mise en œuvre des recommandations qu’il a formulées en 2014 n’est pas « satisfaisante », entre autres la mise en place d’un cadre de gestion, « avec des objectifs précis, mesurables et axés sur les résultats ».

Le porte-parole péquiste en matière d’environnement, le député de Jonquière, Sylvain Gaudreault, s’inquiète qu’on ne puisse toujours pas faire la lumière sur l’administration du Fonds.

« C’est pire, les soupçons sont multipliés par dix », a-t-il déclaré jeudi après-midi, en entrevue téléphonique avec La Presse canadienne. Les parlementaires sont en droit d’obtenir une information juste et fiable, a-t-il poursuivi.

Il est donc « complètement inacceptable » que le Commissaire dise non à la demande des élus d’effectuer une nouvelle vérification. M. Gaudreault envisage donc par un vote de l’Assemblée nationale à le forcer, puisque le Commissaire relève de la Vérificatrice générale, qui est un officier du Parlement.

« On pourrait dire : c’est un ordre de l’Assemblée et tu vas nous faire le ménage là-dedans », a illustré le député.

Pour régler les problèmes de gouverne du Fonds, « qui demeure un Fonds politique » au gré des « plans de match des ministres », M. Gaudreault suggère par exemple d’en faire une agence, qui deviendrait ainsi autonome du gouvernement.

Rappelons que le Fonds vert gère une enveloppe de plus de 1 milliard. Ces fonds proviennent des revenus générés par la vente de droits d’émission de gaz à effet de serre (GES) dans la Bourse du carbone, des redevances pour l’élimination des matières résiduelles et de la redevance pour l’utilisation de l’eau.

L’enveloppe doit servir à financer des projets de réduction des gaz à effet de serre, mais des sommes ont été investies dans des initiatives discutables au cours des années précédentes.

Dans son dernier rapport, le CGFV a constaté que « les résultats en matière de réduction des émissions de GES sont en deçà de la cible fixée. La contribution du Plan d’action sur les changements climatiques (PACC) 2013-2020 à l’objectif global de réduction est beaucoup moins importante que prévu ».