(Ottawa) Les troupes conservatrices d’Andrew Scheer ne voteront pas pour la motion libérale visant à décréter une urgence climatique nationale si celle-ci n’est pas amendée pour en retirer le caractère « hypocrite ».

« Le premier ministre a voyagé en avion privé à Tofino pour des vacances, il a voyagé entre la Floride et Ottawa quatre fois en trois jours… ce ne sont pas les actions d’une personne qui pense [qu’on fait face] à une situation urgente », a-t-il plaidé.

D’autant plus qu’appuyer la motion équivaudrait à endosser le plan climatique libéral alors que celui-ci « n’a aucune possibilité d’atteindre les cibles » fixées dans l’Accord de Paris sur le climat, a insisté le chef en point de presse après la réunion de son caucus.

Le leader conservateur a signalé que le plan qu’il a promis de déposer d’ici la fin juin serait élaboré autour de cette cible qui avait été fixée par l’ancien gouvernement de Stephen Harper, et ensuite reprise par le gouvernement Trudeau.

La ministre de l’Environnement et du Changement climatique, Catherine McKenna, doit déposer jeudi une motion qui vise, de son propre aveu, à forcer les conservateurs à se commettre sur la question environnementale.

PHOTO JUSTIN TANG, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Catherine McKenna

Selon Andrew Scheer, il s’agit d’une manœuvre de diversion : le gouvernement libéral « utilise cette motion » pour faire oublier ses « scandales éthiques », mais aussi parce que le Parti vert a fait une percée sur la scène fédérale la semaine dernière.

Mais y a-t-il urgence climatique nationale ? « C’est clair qu’il y a une urgence », a offert le chef lorsque la question lui a été posée, accusant au passage le premier ministre d’être un « hypocrite » dans le dossier climatique.

« On doit être clair : cette motion, c’est un geste symbolique avec aucune substance, c’est à cause d'une situation d’urgence politique pour Justin Trudeau », a-t-il enchaîné, précisant que sa formation proposera d’amender la motion libérale.

La ministre McKenna, elle, persiste et signe : la tarification du carbone que promet d’annuler Andrew Scheer s’il est élu — et que contestent des premiers ministres comme Doug Ford, en Ontario — est la bonne politique à suivre pour réduire les émissions.

Elle a d’ailleurs pris bien soin de placer les deux chefs conservateurs dans le même panier, les accusant de vouloir « aller en arrière » dans le dossier des changements climatiques.

« On a Doug Ford qui dépense l’argent des [contribuables], 30 millions de dollars pour faire des annonces qui ne sont pas vraies », a signalé Mme McKenna, en faisant référence à une offensive publicitaire contre la taxe carbone lancée en Ontario.

Motion du NPD

Peu avant que la motion libérale ne soit inscrite au feuilleton, lundi, le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Jagmeet Singh, avait déposé une motion similaire, qui allait cependant plus loin en demandant l’arrêt du projet d’oléoduc Trans Mountain.

Sans surprise, le Parti conservateur ne l’appuiera pas. « On va voter contre, parce que nous appuyons la construction d’oléoducs qui peuvent transporter l’énergie canadienne. C’est essentiel pour notre développement économique », a dit M. Scheer.

Il serait étonnant que les libéraux l’avalisent aussi, ayant donné le feu vert au projet de pipeline Trans Mountain — infrastructure dont le gouvernement est devenu propriétaire au coût de 4,5 milliards de dollars.