(Québec et Ottawa) L’entente Québec-Ottawa accordant une voix au Québec dans la nomination du successeur du juge Clément Gascon à la Cour suprême « n’est pas idéale », mais constitue néanmoins « un premier pas », soutient le premier ministre François Legault.

Comme Justin Trudeau, il a signé cette entente lundi sans qu’il y ait eu d’annonce. Il nie que l’absence d’une annonce conjointe soit une preuve de plus des frictions entre les deux ordres de gouvernement.

Selon l’entente, le comité indépendant du fédéral chargé de recommander une courte liste de candidats sera composé de huit membres, dont cinq proviennent du Québec. Le gouvernement québécois nomme deux de ces membres : la vice-rectrice de l’Université Laval, Eugénie Brouillet, et le professeur au Département de sociologie de l’UQAM, Joseph Yvon Thériault. Québec pourra signifier sa ou ses préférences parmi les noms retenus par ce comité, alors qu’Ottawa conserve sa prérogative dans la décision finale. Cette entente ne prévaut toutefois que pour la nomination du successeur de M. Gascon, qui quittera la Cour suprême le 15 septembre.

Lors d’une mêlée de presse, François Legault a rappelé que son engagement électoral, contenu dans son plan nationaliste, prévoit plutôt la mise en place d’un comité formé par le gouvernement du Québec qui sélectionnerait trois candidatures. Les noms seraient soumis à l’Assemblée nationale pour approbation. La liste serait transmise ensuite à Ottawa pour qu’il fasse un choix.

Dans ce contexte, « ce n’est pas idéal comme entente. C’est un premier pas », a-t-il soutenu. « On voulait être capable […] de soumettre des noms et que ce soit parmi ces noms que le fédéral choisit. Maintenant, on a une bonne étape de franchie, une étape importante où là, le Québec va participer dans un comité où on va nommer deux personnes. »

Pour la ministre de la Justice, Sonia LeBel, la promesse de la CAQ nécessiterait ultimement une modification constitutionnelle. Le dépôt d’un projet de loi en vue de réaliser cet engagement n’est donc pas sur l’écran radar du gouvernement « à court terme ».

« Soyons optimistes », a répondu François Legault lorsqu’on a lui a demandé s’il croit possible d’arriver à modifier la Constitution pour que sa promesse se concrétise. « On a devant nous des années qui s’en viennent, et j’ai confiance qu’on va faire des gains avec le fédéral. »

Sonia LeBel a quant à elle parlé d’une « entente historique », « un précédent » que le gouvernement du Québec cherchera à « rendre pérenne » en vue de prochaines nominations. Il y a trois sièges réservés au Québec parmi les juges de la Cour suprême.

Une entente « pour durer », espère Lametti

Sur l’autre colline, son homologue fédéral David Lametti a également parlé d’un jalon de l’« histoire » dans les relations Ottawa-Québec. Et lui aussi espère que l’entente est là « pour durer » ; qu’elle servira de canevas pour les prochaines nominations.

Il a convenu qu’il serait impossible de savoir si les ministres ont proposé la même candidature, ou encore sur laquelle le premier ministre canadien décide finalement de jeter son dévolu.

L’accord a été conclu alors que Justin Trudeau s’apprête à nommer un magistrat pour combler le siège que laissera vacant le juge Clément Gascon. Ce dernier a causé une frousse mercredi passé en disparaissant de façon inexpliquée pendant quelques heures.

Le magistrat âgé de 58 ans a levé le voile sur la dépression dont il souffre depuis plus d’une vingtaine d’années, attribuant à une crise de panique cette disparition « inédite et inhabituelle » dans un communiqué publié mardi, qui lui a valu une vague d’appuis.

Le ministre Lametti s’est dit « très fier » que le juge ait eu le « courage » de se livrer ainsi, assurant avoir pleine confiance en lui. « La dépression, c’est quelque chose que beaucoup de monde vit », a-t-il commenté en mêlée de presse au parlement.

La date du départ du magistrat québécois a été fixée le 15 septembre prochain. Comme le permet la Loi sur les juges, il peut demeurer en poste jusqu’à six mois après cette date pour rédiger des jugements sur des causes qu’il a entendues.

Au bureau du premier ministre Trudeau, on a l’intention de le remplacer bien avant la tenue du scrutin.