(Longueuil) Ce n’est pas tant au taux de condamnations pour agression sexuelle que la ministre de la Justice Sonia Lebel veut s’attaquer qu’au nombre de dénonciations de ces agressions et à la confiance dans le processus suivi par la victime.

La ministre Lebel a participé, jeudi à Longueuil, à un colloque sur les violences sexuelles, « Justice à l’ère de MoiAussi ». Et dans le cadre de ce colloque, elle a précisé sa pensée sur la réforme qu’elle voulait voir en la matière.

Bien qu’elle juge « positif » le mouvement #moiaussi, qui a entraîné une vague de dénonciations d’agressions sexuelles sur les réseaux sociaux, la ministre de la Justice estime que ce n’est pas la voie à suivre.

« La sonnette d’alarme que ça sonne dans ma tête, c’est : si elles le font de cette façon-là, c’est qu’elles n’ont pas confiance au système de justice pour les aider et les accompagner. Et si les médias traditionnels et les médias sociaux deviennent le chemin vers lequel elles se tournent massivement, c’est parce que c’est le temps qu’on se réveille », a opiné la ministre Lebel, elle-même une ancienne procureure de la Couronne.

En conséquence, c’est surtout la confiance des victimes envers le processus judiciaire qu’elle veut voir croître, non pas nécessairement obtenir un plus haut taux de condamnations au criminel.

« Mon objectif comme ministre de la Justice, ce n’est pas d’augmenter le taux de condamnation, parce que pour moi, c’est trop académique, c’est trop cartésien. C’est d’augmenter le taux de confiance des victimes dans le processus judiciaire, peu importe, le résultat », a-t-elle ajouté.

Elle a bon espoir que si elle accroît la confiance des gens dans le système de justice, si le système de justice s’adapte mieux à ces réalités, il y aura un effet sur les condamnations par voie de conséquence.

« Je suis confiante que si j’augmente la confiance des gens dans le système de justice, si on est capable de mieux adapter nos solutions aux parcours individualisés de chaque victime, nécessairement je pense qu’il y aura un effet sur les condamnations. J’en suis convaincue », a-t-elle affirmé.

50 millions pour le mandat du comité

D’ailleurs, pour la guider dans sa réforme, la ministre a mis sur pied en mars dernier un comité d’experts sur l’accompagnement des victimes d’agression sexuelle et de violence conjugale.

Le dernier budget du ministre des Finances Eric Girard a réservé 50 millions sur cinq ans pour la réalisation du mandat du comité.

La ministre Lebel a souligné qu’elle ne voulait pas « encarcaner le comité » en attribuant à l’avance cette somme à un volet particulier de son mandat. « C’est vraiment de l’argent qui est mis en support aux conclusions et aux recommandations que le comité élaborera. » Ce comité « a toute la latitude nécessaire pour penser en dehors de la boîte », a-t-elle insisté devant les participantes au colloque.