Le chef du Parti conservateur du Canada Andrew Scheer avait promis de distiller son programme électoral en cinq discours-phares au cours des prochaines semaines. Et il a commencé les choses en grand à Montréal.

Détaillant ses engagements en matière de politique étrangère et de défense nationale devant le Conseil des relations internationales de Montréal (CORIM), M. Scheer a sans surprise mené une charge à fond de train contre le gouvernement Trudeau. Mais il a surtout ouvert son jeu sur la ligne dure qu’il compte imposer aux géants russe et chinois, en plus de livrer une profession de foi unilatérale en faveur d’Israël.

« Je compte fermement rejeter l’idée que le Canada pourrait ou devrait être neutre sur les grandes questions de notre époque », a-t-il dit devant quelques centaines de personnes réunies au Château Champlain.

Il a tracé la ligne entre « les démocraties libres » et « les régimes impérialistes, despotes et corrompus qui veulent déstabiliser l’ordre international fondé sur des règles ».

« Dans le climat actuel, je vois la montée de la Chine, le ré-émergence de la mentalité de Guerre froide de la Russie ainsi que les États qui exportent le terrorisme et l’extrémisme comme trois des plus importantes menaces à la sécurité et à la prospérité canadienne », a-t-il résumé.

À ses yeux, « la posture d’adversaire adoptée par la Chine » sur le plan commercial est « profondément décevante ».

« La relation du Canada avec la Chine doit être complètement réinitialisée [needs a total reset] », a tranché le chef de l’opposition à Ottawa, ajoutant que la Chine « est certainement la plus forte propagatrice des valeurs autoritaires ».

« Le libre-échange avec la Chine ne sera possible que lorsque la Chine aura un système de loi fonctionnel, alors que le système judiciaire ne sera plus contrôlé par le Parti communiste. »

« Tant et aussi longtemps que la Chine tiendra nos exportations en otage tout en commentant des violations aux droits humains à une grande échelle, nous n’avons d’autre choix de chercher d’autres partenaires commerciaux », a-t-il encore dit.

Il a conclu en affirmant que « d’abord viendra la confiance [avec la Chine], ensuite le commerce. Nous pourrons y arriver, mais une longue, longue route nous en sépare ».

Russie, Israël

Andrew Scheer s’en est aussi pris à la Russie et à son président Vladimir Poutine, « qui ne peut plus agir en toute impunité ».

« Il occupe aujourd’hui l’Ukraine ; demain, ce pourrait être les eaux arctiques canadiennes », prévient-il, dénonçant le soutien de la Russie aux régimes iranien et syrien. La Russie et l’Iran, estime-t-il, « ont été ensemble les principales sources de perturbation et de désespoir au Moyen-Orient ».

Du même souffle, M. Scheer a appelé à un « renouveler notre soutien à Israël et à son droit de se défendre elle-même ».

« Il est navrant [disappointing] que le gouvernement actuel ait abandonné le support de principe du Canada à Israël. »

« Le Canada doit être prêt et digne de confiance quand Israël devra compter sur son ami et allié démocratique. »

Soulignant son « amitié » envers la Palestine, il a néanmoins affirmé que « la démocratie est refusée aux Palestiniens non pas par Israël, mais par leur propre gouvernement ».

M. Scheer s’engage également à reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël et à y déplacer l’ambassade du Canada dans ce pays s’il est élu.

États-Unis

Andrew Scheer a par ailleurs dit souhaiter que se réchauffent les relations canado-américaines. Bien qu’il concède que le président Trump « renverse des décennies de politique étrangère américaine bien établie », il déplore qu’en renégociant l’ALENA, « le gouvernement [canadien] actuel a fait la leçon au président américain sur des enjeux qui n’ont rien à voir avec le commerce ». Ainsi, à ses yeux, « nous ne pouvons laisser la personnalité tromper les liens entre nos deux pays ».

Il accuse d’ailleurs le gouvernement Trudeau d’avoir alimenté « la tension et la méfiance » entre deux pays « qui devraient être les deux plus grands alliés du monde ».

M. Scheer a en outre vanté les États-Unis et l’Australie dans le financement et la valorisation de leurs armées.

« Ce sont deux exemples où il y a un consensus fort sur la question de la défense nationale ; en bout de ligne, les projets vont de l’avant. Ce n’est pas le cas au Canada », a-t-il déploré.

En conclusion de son discours d’une demi-heure, le chef conservateur a dit croire « fondamentalement que nous devons être honnêtes avec nous-mêmes sur les menaces auxquelles nous faisons face ».