(Ottawa) Le Parti conservateur du Canada ajoute des vérifications policières plus détaillées à son processus de sélection des candidats et crée une politique spécifique pour le traitement des plaintes déposées contre des députés et des candidats.

Ces mesures se retrouvent parmi les six recommandations de Carole Nielson, une avocate qui avait été embauchée par le parti il y a plus d’un an pour enquêter sur le cas de Rick Dykstra, qui a pu continuer à être candidat aux élections de 2015 malgré les allégations d’inconduite sexuelle pesant contre lui.

M. Dykstra, qui a représenté la circonscription ontarienne de St. Catharines pendant près de dix ans, nie avoir fait quoi que ce soit de répréhensible. Il avait perdu son siège lors des élections, qui se sont tenues avant que les allégations ne soient rendues publiques.

Le rapport de Mme Nielson indique que les responsables du parti n’ont pas effectué une enquête exhaustive sur les allégations, étant donné qu’il n’y avait pas de protocole clair pour traiter de telles plaintes.

« Sans principes directeurs pour guider la réaction de l’équipe de campagne à la situation, chaque membre de l’équipe de campagne s’est appuyé sur sa propre approche du bon sens face à la situation », affirme Mme Nielson.

À la sortie de la Chambre des communes, vendredi, les élus conservateurs ont refusé de commenter le rapport. La ministre libérale Mélanie Joly, elle, a eu moins de retenue.

« Le défaut du Parti conservateur, de ne pas avoir pris au sérieux cette plainte-là, est en soi un énorme problème qui parle d’une culture qui va à l’encontre des intérêts et des droits des femmes », a-t-elle soutenu.

Une décision différente ?

Dans son rapport, Mme Nielson souligne que le parti avait demandé à son avocat de faire des vérifications sur Rick Dykstra ; ce dernier a fini par parler à M. Dykstra et à un responsable du parti. Or, le parti n’a jamais cherché à recueillir le témoignage de la plaignante — qui réclamait le respect de sa vie privée — et les vérifications sur M. Dykstra n’étaient pas suffisantes, de l’avis de Mme Nielson.

Le parti s’est fié aux propos de M. Dykstra, selon lesquels la police avait enquêté et avait décidé de ne pas déposer d’accusations contre lui. Or, Mme Nielson souligne que le parti n’avait pas pris la peine de confirmer l’information avec les policiers. La police dit avoir abandonné l’enquête puisque la plaignante ne voulait pas aller de l’avant.

Mme Nielson dit qu’il est difficile de déterminer si une enquête plus minutieuse aurait pu changer les choses. Mais Ray Novak, qui était chef de cabinet de l’ancien premier ministre Stephen Harper à l’époque, avait déclaré l’année dernière que si de nouvelles informations sur l’affaire avaient été connues — telles que la raison pour laquelle l’enquête de la police avait été close —, M. Dykstra aurait été écarté de la campagne électorale.

Les hauts dirigeants du Parti conservateur ont été informés de la plainte déposée contre M. Dykstra lors de la campagne de 2015 et il y avait un désaccord important quant à la manière de la traiter.

M. Harper a affirmé l’année dernière qu’il avait pris la décision de laisser M. Dykstra sur le bulletin de vote et qu’il l’avait prise en s’appuyant sur les informations dont il disposait à l’époque.

L’ancien président de campagne satisfait

Guy Giorno, président de la campagne nationale en 2015, pensait que M. Dykstra aurait dû être renvoyé pendant la campagne. L’année dernière, M. Giorno avait qualifié l’enquête de Mme Nielsen de « mascarade » et avait signalé qu’il n’aurait aucune confiance dans les résultats. Mais vendredi, il était satisfait des conclusions.

« Le rapport confirme ma position selon laquelle M. Dykstra aurait dû être écarté en tant que candidat, a-t-il soutenu dans un courriel transmis à La Presse canadienne. Je suis ravi de voir mes contributions reflétées dans les recommandations et j’ai hâte de les voir mises en œuvre. »

Le chef conservateur Andrew Scheer a nommé Hartley Lefton, un avocat torontois qui a organisé la course à la direction du Parti progressiste-conservateur de l’Ontario l’an dernier, en tant que responsable de la conformité pour veiller à la mise en œuvre des recommandations.

« Je suis persuadé que notre équipe de campagne dispose maintenant des outils dont elle a besoin pour atteindre cet objectif et je suis impatient que M. Lefton supervise la mise en place des recommandations solides de Mme Nielsen », a-t-il affirmé dans un communiqué.