Le débat sur le projet de loi 21 sur la laïcité du gouvernement Legault a dérapé, vendredi, lors d'une conférence de presse annonçant la tenue d'une manifestation contre ce projet de loi le 14 avril prochain.

Le maire de Hampstead, William Steinberg, a affirmé que le projet de loi 21 représente une forme de « nettoyage ethnique » par voie législative.

Sa déclaration a pris de court la demi-douzaine d'élus et leurs représentants issus de municipalités de l'Ouest de l'île de Montréal, du gouvernement provincial et du gouvernement fédéral, qui s'en sont distancés aussitôt.

Le maire Steinberg a affirmé qu'« une société laïque n'impose pas une religion par-dessus les autres », ajoutant que le projet de loi 21 est « une tentative de faire exactement cela ».

« Le résultat sera que les juifs, les musulmans et les sikhs ne viendront pas à un endroit où leurs perspectives d'emploi seront limitées. Ceux qui vivent déjà ici auront tendance à partir », a-t-il poursuivi.

Il a complété son raisonnement en soutenant que ce projet de loi « est une tentative de faire partir ceux qui pratiquent des religions minoritaires, ne laissant que des non-croyants et des chrétiens au Québec. C'est du nettoyage ethnique - pas avec un fusil, mais avec une loi. C'est raciste et c'est ignoble. »

Malaise

À ses côtés, le député libéral fédéral de Mont-Royal, Anthony Housefather, le maire de Côte-Saint-Luc, Mitchell Brownstein, le maire de Montréal-Ouest, Beny Masella, le conseiller municipal de Snowdon, Marvin Rotrand, ainsi qu'un représentant du député libéral provincial de D'Arcy-McGee David Birnbaum avaient du mal à cacher leur malaise lorsque le maire Steinberg a lancé ce pavé dans la mare.

Aucun d'entre eux n'a voulu endosser de tels propos ou même les commenter.

Anthony Housefather a fait valoir que l'objectif de la manifestation était d'amener le projet de loi à être retiré, modifié ou défait.

« Aucun enfant ne devrait être privé du droit de croire qu'il peut occuper n'importe quel emploi et cette loi nie cela », a déclaré le député, ajoutant que l'ajout de la disposition de dérogation pour tuer dans l'oeuf toute contestation devant les tribunaux était injustifié.

« Utiliser la disposition de dérogation avant que la loi ne soit soumise au test des tribunaux la rend encore plus injuste », a fait valoir M. Housefather.

« Pas acceptable »

Confronté à ces propos dans les minutes suivantes, le ministre de l'Immigration et parrain du projet de loi sur la laïcité, Simon Jolin-Barrette, a d'abord cherché à justifier la teneur de la législation, mais il a dû se résigner à les commenter lorsque pressé de le faire.

« Des accusations comme celle-ci elle n'ont pas leur place. J'invite le maire (Steinberg) à faire part de sa divergence d'opinion dans le respect des opinions de tous les Québécois. Cela étant dit, des propos comme ceux-ci ne sont pas acceptables dans un débat comme nous aurons dans les prochaines semaines », a-t-il déclaré.

Il en a profité pour lancer un appel à débattre dans un climat serein.

« J'en appelle au calme, à la sérénité. On est capables au Québec de débattre d'une question importante comme celle-là dans le respect de tous et chacun », a-t-il dit, ajoutant que « des accusations comme celle-ci n'ont pas leur place ».

Il a promis, de son côté, d'en faire autant.

« Je vais toujours me comporter, durant le débat sur le projet de loi 21, en raison de la sensibilité des enjeux, avec un ton calme et serein parce que les Québécois ne souhaitent pas qu'on se déchire. On souhaite se rassembler et on souhaite tourner la page sur le dossier de la laïcité et sur le dossier du port de signes religieux. »