(Ottawa) Les libéraux de Trudeau ont ouvert la porte, lundi, à modifier la manière dont le gouvernement fédéral détermine l’aide financière qu’il accorde aux provinces en difficulté financière. Une annonce qui précédait les pourparlers prévus entre les ministres des Finances du pays.

Le ministre fédéral Bill Morneau a toutefois été clair sur le fait qu’aucune décision ne serait prise avant le début des discussions, lundi soir, et qu’elle dépendrait des réponses aux autres préoccupations soulevées par ses homologues provinciaux et territoriaux.

Déjà, le gouvernement fédéral a entendu des objections sur la façon dont Ottawa calcule combien d’argent envoyer aux provinces et territoires soi-disant moins nantis afin que ces juridictions puissent fournir des niveaux de services similaires à leurs citoyens.

Cinq provinces recevront des paiements au cours de l’exercice financier qui doit débuter en avril. Les chiffres publiés tout juste avant un souper de travail entre tous les ministres prévoient des transferts de près de 20,6 milliards de dollars partagés entre l’Île-du-Prince-Édouard, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, le Manitoba et le Québec. En raison de sa population bien plus nombreuse, c’est le Québec qui doit recevoir la part du lion, soit environ 13,3 milliards.

L’Alberta, la Saskatchewan et certaines autres provinces sont en colère contre la façon dont cette aide est calculée et pressent Ottawa d’élargir un programme fédéral à plus court terme conçu pour aider les provinces à faire face à des ralentissements économiques soudains.

Ce programme est beaucoup plus simple à modifier que la complexe formule du programme de péréquation et certains amendements pourraient représenter des milliards de dollars pour les provinces durement éprouvées par la chute des prix du pétrole. Ces provinces demandent l’élimination du plafond fixé à 60 $ par citoyen et la possibilité d’obtenir des versements rétroactifs.

Le ministre des Finances de l’Ontario, Rod Phillips, confirme que ses collègues et lui vont se présenter à la rencontre avec une proposition unanime de bonification du programme de stabilisation fiscale. Une entente conclue la semaine dernière lors d’une conférence téléphonique organisée par la ministre de la Saskatchewan Donna Harpauer.

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Rod Phillips et Bill Morneau

Sans en dévoiler les détails, M. Phillips a parlé d’une offre qui « reflète la complexité de l’économie canadienne d’aujourd’hui ». Si de tels changements vont bénéficier à court terme aux provinces productrices d’hydrocarbures, le ministre ontarien fait remarquer que toutes les provinces sont à risque de se retrouve un jour ou l’autre devant une crise soudaine.

« Je crois qu’il faut voir cette opportunité comme une manière de renforcer la nation et toutes les provinces devraient l’appuyer, car il faut être conscient que de tels défis pourraient bien devenir les nôtres à l’avenir », a-t-il déclaré.

Morneau a accepté de discuter de la question lors de sa rencontre avec ses homologues des provinces et a noté que sa seule rencontre en tête-à-tête depuis l’élection d’octobre avait été avec le ministre des Finances de l’Alberta, Travis Toews.

« Nous avons été très clairs sur le fait qu’il s’agit d’un programme qui n’a pas été revu depuis longtemps et que nous sommes prêts à y réfléchir », a déclaré Bill Morneau quelques heures avant un souper de travail devant donner le coup d’envoi au sommet des ministres des Finances et juste après avoir dévoilé une mise à jour sur l’état des finances fédérales.

Si les ministres s’attendent à faire du progrès dans ce dossier, mardi, une résolution finale devrait probablement nécessiter d’abord un sommet des premiers ministres, ce que Justin Trudeau a promis d’organiser en début d’année 2020.

Le ministre québécois des Finances, Eric Girard, a admis qu’il n’espérait pas la conclusion d’une entente dès mardi.

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Eric Girard

D’ailleurs, avant de prendre toute décision, le ministre fédéral Bill Morneau a dit vouloir entendre les autres préoccupations des provinces, dont celle concernant l’indexation annuelle de 3 % des transferts en santé, un ratio considéré insuffisant. Les provinces viseraient une croissance annuelle des paiements de 5,2 %.

Bill Morneau a, lui aussi, identifié un enjeu qu’il souhaite aborder : l’assurance-médicaments universelle. Une idée que les premiers ministres ont déjà accueillie avec réticence alors que selon eux les soins de santé de base ne sont même pas dispensés adéquatement.

D’après les chiffres présentés dans la mise à jour économique fédérale, publiée lundi, les paiements aux provinces et aux territoires devraient passer de 76,3 milliards de dollars au cours de l’exercice actuel qui se termine en mars 2020, à 81,6 milliards de dollars pour les 12 mois suivants et, grimper jusqu’à 91 milliards de dollars en mars 2025.

L’an prochain, les transferts de fonds les plus importants seront de 26 milliards au Québec, incluant la péréquation, et de 22,1 milliards à l’Ontario.

Dans l’ensemble, les transferts aux provinces vont demeurer stables en pourcentage de l’économie. Le ministère fédéral des Finances prévoit que ceux-ci vont rester à 3,3 % de la performance économique du pays au cours des cinq prochaines années.

Bill Morneau a décrit ce sommet des ministres de première étape dans la refonte des relations financières entre les gouvernements fédéral et provinciaux.