(Québec) Levée de boucliers à Québec contre le fédéral, qui menace de contourner les provinces pour financer les projets d’infrastructures des municipalités.

Tous les partis à l’Assemblée nationale ont rappelé, mardi, la position traditionnelle du Québec : les municipalités relèvent du gouvernement du Québec et Ottawa doit obtenir l’accord du Québec pour y distribuer ses fonds.

Vendredi dernier, au congrès annuel de la Fédération canadienne des municipalités (FCM) dans la Vieille-Capitale, le premier ministre Justin Trudeau avait lancé aux maires et conseillers que « si (les provinces) ne veulent pas travailler avec le fédéral, nous allons trouver un moyen de continuer à travailler avec vous ».

Le gouvernement caquiste et le Parti québécois (PQ) ont condamné en Chambre les propos de M. Trudeau et appelé au respect des compétences du Québec.

« Quand le gouvernement du Québec veut faire valoir ses priorités, il se fait accuser de faire de la chicane, de faire de l’obstruction, de bloquer, a déploré le chef intérimaire péquiste, Pascal Bérubé, à la période de questions. Pourtant, la loi M-30 est claire : toute discussion, toute entente en matière d’infrastructure municipale doit passer par le gouvernement du Québec qui doit être présent. »

Le premier ministre François Legault a abondé dans le même sens dans sa réponse et a même ouvert la porte à une mission commune à Ottawa, que Pascal Bérubé a même acceptée dans un gazouillis.

« On va tenir notre bout, a dit M. Legault. S’il faut, on ira, tous les deux ensemble, rencontrer le gouvernement fédéral. Mais il n’est pas question que le gouvernement fédéral intervienne directement avec les municipalités sans l’accord du Québec. »

L’opposition officielle a joint sa voix pour une rare fois à la fois au gouvernement caquiste et à la formation indépendantiste péquiste.

« C’est très spécial d’entendre Justin Trudeau parler de cela », a déclaré le chef intérimaire de l’opposition officielle, Pierre Arcand, en entrevue avec La Presse canadienne mardi après-midi.

« Si le gouvernement fédéral a quelque chose à donner aux municipalités, il faut que ce soit de concert avec le gouvernement du Québec », a dit M. Arcand. Il a dit que son parti était prêt à appuyer une motion de l’Assemblée nationale pour rappeler ce principe.

Il en a toutefois profité pour décocher une flèche aux caquistes, en les accusant de se traîner les pieds dans l’attribution du financement des projets d’infrastructures aux municipalités.

« Les maires sont frustrés, ça n’avance pas au niveau du gouvernement du Québec, actuellement, ça semble difficile », a poursuivi M. Arcand.

Il faisait ainsi écho aux propos du président de l’Union des municipalités du Québec (UMQ), Alexandre Cusson, le maire de Drummondville, qui lui se réjouissait vendredi des déclarations de Justin Trudeau : « Évidemment, pour le monde municipal, c’est une bonne nouvelle, avait-il déclaré en entrevue. La partie de ping-pong a assez duré entre Ottawa et les provinces. »

Québec solidaire (QS) a également réagi. Le parti de gauche a tenu à condamner « l’arrogance » du fédéral, tout en ajoutant qu’Ottawa ne faisait que profiter de la mollesse du gouvernement caquiste.

« Cette attitude est une raison de plus pour faire l’indépendance, a affirmé le porte-parole de QS, Gabriel Nadeau-Dubois, dans une déclaration écrite. François Legault a le devoir de faire respecter les champs de compétence du Québec contre l’arrogance d’Ottawa. Malheureusement, comme le nationalisme mou de M. Legault n’est rien d’autre que du fédéralisme de complaisance, il n’y a rien de surprenant à ce que Justin Trudeau se sente légitime de marcher sur ses pieds. »

Rappelons que le gouvernement Legault et le fédéral sont actuellement engagés dans un bras de fer concernant le financement du projet de tramway de Québec.

Le gouvernement caquiste est toujours prêt à avancer 1,8 milliard dans ce projet de plus de 3 milliards, mais il reproche à Ottawa de fournir seulement 400 millions destinés précisément à Québec sur les 1,2 milliard attendus initialement.