(Québec) Le projet de loi sur la laïcité pourrait avoir sa place dans un grand musée fédéral des droits de la personne situé à Winnipeg, a appris La Presse canadienne.

Chaque année, près de 300 000 personnes visitent le Musée canadien pour les droits de la personne — premier musée national canadien à l’extérieur d’Ottawa — afin de réfléchir au traitement réservé à différents peuples.

Le musée traite entre autres de la liberté de conscience et de religion, en faisant notamment référence au projet de loi 94 du gouvernement Charest, explique la porte-parole Maureen Fitzhenry.

Vu de Winnipeg, ce projet de loi, mort au feuilleton en 2012, « proposait d’interdire les couvre-visages (sic) en public et aurait touché les femmes musulmanes qui choisissent de porter la burqa ou le niqab », a-t-elle dit.

Le projet de loi 94 a été suivi de la Charte des valeurs du Parti québécois et de la loi 62 du gouvernement Couillard, qui a été contestée devant les tribunaux.

Le musée songe à rafraîchir son exposition, alors que le gouvernement caquiste revient à la charge avec son projet de loi 21 visant à interdire le port de signes religieux aux employés de l’État en position d’autorité, dont les enseignants.

« Nous envisageons de mettre à jour cet élément d’exposition, ce qui pourrait inclure une référence au projet de loi 21, mais ces décisions n’ont pas encore été finalisées, en partie parce que le sort du projet de loi 21 n’est pas encore connu », a déclaré Mme Fitzhenry dans un échange par courriel avec La Presse canadienne.

Chose certaine, selon la porte-parole, « la liberté de religion est un droit de la personne qui est important et garanti par la Charte canadienne des droits et libertés et par la Déclaration universelle des droits de l’homme ».

Elle précise que le musée offre également une exposition de photos intitulée « Ce qui nous voile », conçue par l’activiste québécoise Andréanne Paquet « pour susciter la réflexion et la conversation sur les femmes musulmanes du Québec qui portent le hidjab ».

Sur le site web du musée, on affirme vouloir « briser les stéréotypes » en demandant aux femmes d’expliquer pourquoi elles choisissent de porter le voile. La lutte pour l’égalité homme-femme au Canada n’est pas terminée, ajoute-t-on.

Un autre élément d’exposition examine la décision de la Cour suprême sur le droit d’un élève sikh du Québec de porter le kirpan (Multani c. Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, 2006).

« Bien que ces pièces ne fassent pas expressément référence au projet de loi 21, elles traitent de bon nombre des mêmes questions de droits de la personne que celles qui sont soulevées par cette loi », a affirmé Mme Fitzhenry.

Le ministre de l’Immigration qui pilote le projet de loi 21, Simon Jolin-Barrette, n’était pas immédiatement disponible mercredi pour commenter.

Pour sa part, la porte-parole libérale en matière de laïcité, Hélène David, maintient que ce n’est pas « génial » ni « idéal » pour le Québec de se faire connaître sous cet angle.

Elle cite l’ex-président du Conseil supérieur de l’éducation Jean-Pierre Proulx, qui croit que le projet de loi 21 va entacher la réputation du Québec à l’international.

« C’est sûr que du côté anglo-canadien, il y a beaucoup de scepticisme et de questionnement par rapport à notre évolution supposément républicaine de la laïcité », a-t-elle dit en entrevue.

Le Musée canadien pour les droits de la personne a ouvert ses portes en 2014. Il a pour mission d’étudier le thème des droits de la personne en mettant un accent particulier, mais non exclusif, sur le Canada, dans le but d’inspirer la réflexion et le dialogue. Tout récemment, il a abordé la Shoah, l’apartheid en Afrique du Sud et la persécution des Rohingya, en Birmanie.