(Québec) Les Québécois qui ont signé la pétition de la Coalition avenir Québec (CAQ) exigeant le remboursement des trop-perçus d’Hydro-Québec en 2017 ont été « doublement floués », estime l’opposition officielle libérale.

Non seulement l’équipe caquiste n’a pas remboursé ces trop-perçus une fois arrivée au pouvoir, mais elle a probablement mal utilisé les données personnelles de quelque 55 000 signataires, a accusé le député Saul Polo. L’affirmation a aussitôt été réfutée par le ministre de l’Énergie, Jonatan Julien. « Je ne pense pas qu’on les utilise », a-t-il dit.

M. Polo a d’abord fait ce lien la semaine dernière, lors de l’étude des crédits du ministère de l’Énergie. Il est allé plus loin en entrevue mardi, en affirmant soupçonner la CAQ de s’être servie de la question des trop-perçus pour engraisser sa banque de données avant les élections.

« Aujourd’hui, on peut se poser la question si (les électeurs) ont été doublement floués face à une promesse non respectée et d’autre part, face à de l’information et des données qui ont été utilisées peut-être autrement que pour le sujet en question », a-t-il déclaré.

« Qu’est-ce qu’ils ont fait avec ces données-là ? […] Est-ce qu’ils les ont utilisées pour bâtir des profils d’électeurs pour les sonder sur d’autres enjeux ou leur demander de faire du financement ? […] Qui gère ces données-là aujourd’hui et où sont-elles archivées, est-ce qu’elles sont sécurisées ? » s’est-il interrogé.

Il réclame que les règles entourant la protection de la vie privée des électeurs soient « resserrées », mais ne va pas jusqu’à demander une enquête formelle du Directeur général des élections du Québec (DGEQ) sur la pétition de la CAQ.

Il croit que la Commission des institutions de l’Assemblée nationale l’abordera de toute façon avec le DGEQ, Pierre Reid, au moment de sa comparution annuelle devant les parlementaires le 27 mai.

Le député péquiste Martin Ouellet a eu ces commentaires sur Twitter : « Oui, les pétitionnaires ont été “doublement floués” : floués une première fois par les libéraux qui ont refusé de les rembourser, puis floués de nouveau par les caquistes qui refusent aussi. »

Les Québécois « se questionnent de plus en plus »

Selon Saul Polo, les Québécois « sont en droit » d’obtenir des réponses sur l’utilisation faite par les partis politiques de leurs données personnelles.

« Les gens aujourd’hui se questionnent de plus en plus, qu’est-ce que les partis politiques ou les entreprises font avec les données qu’ils collectent », constate-t-il.

L’élu de Laval-des-Rapides s’est empressé de soulever un deuxième cas. Le mois dernier, la CAQ a lancé une campagne en ligne pour inviter les Québécois à se prononcer sur le projet de loi 21, qui vise à interdire le port de signes religieux à certaines catégories d’employés de l’État.

Les répondants étaient dirigés vers le site web de la CAQ, où on leur demandait d’exprimer leur opinion tout en indiquant leur nom, prénom, adresse courriel et code postal. Ceux qui le voulaient pouvaient aussi donner leur numéro texto (SMS). « Avec quel objectif ? » se demande M. Polo.

À l’heure actuelle, les partis ne sont assujettis à aucune loi en matière de protection des renseignements personnels, ce qui a toujours empêché le DGEQ de mener des vérifications.

En février dernier, Me Reid a recommandé de mettre sur pied une commission spéciale pour qu’elle se saisisse de la question. Tous les partis représentés à l’Assemblée nationale se sont d’ailleurs dits prêts à légiférer pour encadrer l’usage des données personnelles des électeurs par les partis politiques.

Déjà, dans son rapport annuel de gestion 2012-2013, le DGEQ recommandait une révision de la loi électorale. Il se disait « préoccupé », dans son rapport annuel de 2016-2017, par la mise en place de banques de données qui recueillent des renseignements sur les électeurs sans que ces derniers aient consenti à cette collecte.