Compte rendu d'un discours attendu, qui, pour l'essentiel, reprend les promesses caquistes de la campagne électorale.

ÉDUCATION: BUDGET PROTÉGÉ

« L'heure du redressement national en éducation a sonné », a lancé François Legault en présentant son plan d'action pour le mandat. Le premier ministre a osé un parallèle historique : lors de la Révolution tranquille, le Québec a « donné une forte impulsion à son développement » par des investissements massifs en éducation, lesquels ont mené à la création des polyvalentes, des cégeps et du réseau d'universités publiques. Aujourd'hui, « il est temps de s'y remettre, de donner une nouvelle impulsion », a-t-il plaidé. Car les défis sont majeurs, selon lui : « Des écoles ont été laissées à l'abandon, des enfants avec des difficultés d'apprentissage ont été laissés à eux-mêmes, et le Québec a pris un sérieux retard en matière de réussite scolaire. »

« Pour la première fois depuis les années 60, l'éducation va être la première priorité du gouvernement, a-t-il soutenu. C'est par l'éducation que le Québec a fait son rattrapage dans les années 60. C'est par l'éducation qu'on va relever d'abord les défis qui nous attendent dans les prochaines années. » Il a garanti que le budget de l'éducation « va être protégé », même en cas de ralentissement économique. « Le financement de l'éducation va être en augmentation pour l'ensemble de cette législature », a-t-il ajouté. En campagne électorale, il était un peu plus précis : il s'était engagé à augmenter les dépenses en éducation de 3,5 % par année (contre 4,1 % pour la santé). « Le moyen le plus puissant d'augmenter notre niveau de richesse, à long terme, c'est de mieux réussir en éducation », a-t-il fait valoir.

MATERNELLE 4 ANS: RÉPONSE AUX DÉTRACTEURS

François Legault a répondu longuement à ses détracteurs au sujet de sa promesse phare : la maternelle 4 ans. « Ce que je trouve le plus décevant, c'est d'entendre le discours fataliste : "On ne sera pas capable d'offrir des services à tous les enfants de 4 ans d'ici cinq ans." Je trouve que ce discours manque de volonté politique et d'ambition. » Il faut plutôt de « l'audace » - un mot qu'il a répété une douzaine de fois dans son discours d'environ une heure. À ceux qui craignent qu'un enfant de 4 ans soit trop jeune pour aller à l'école, « rassurez-vous, la prématernelle 4 ans est fondée sur des techniques adaptées au jeune âge, notamment l'apprentissage par le jeu ». Du reste, le programme ne sera pas obligatoire, « donc vous aurez le choix » d'y envoyer votre enfant ou pas, a-t-il ajouté.

« Le gouvernement n'a aucunement l'intention de démanteler ou d'affaiblir le réseau des CPE. » Il veut offrir des services aux milliers d'enfants qui n'y ont pas accès. Les deux réseaux sont « complémentaires », a-t-il insisté. Ses autres chantiers : abolir les élections scolaires, transformer les commissions scolaires en centres de services aux écoles, mieux payer les enseignants en début de carrière, valoriser la profession enseignante, embaucher du personnel professionnel, ajouter cinq heures par semaine au secondaire pour les sports, les arts et l'aide aux devoirs.

ÉCONOMIE: DEUXIÈME PRIORITÉ

François Legault veut faire du Québec une « superpuissance énergétique », reprenant ainsi une expression qui a été souvent utilisée par l'ancien premier ministre du Canada, Stephen Harper. « Plus la pression va augmenter pour réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le monde et plus l'énergie propre du Québec va devenir un facteur-clé dans les décisions d'investissements », a déclaré M. Legault. Selon lui, le Québec a la capacité d'offrir de l'énergie propre à ses voisins - notamment l'Ontario et les États de la Nouvelle-Angleterre - dans une situation « gagnant-gagnant ». « Il faut voir le Québec comme la batterie du nord-est de l'Amérique », a-t-il clamé. La province a la capacité selon lui d'exporter plus d'électricité, d'éliminer ses surplus pour enfin lancer des constructions d'éoliennes et éventuellement de nouveaux grands barrages.

Par ailleurs, François Legault a repris un message qu'il a martelé ces dernières années : réduire le fardeau fiscal des Québécois. Le gouvernement de la CAQ déposera bientôt un projet de loi pour réformer la taxation scolaire afin que le taux le plus bas s'applique à l'ensemble du Québec. Autres allègements prévus : une hausse de l'allocation familiale et un retour à un tarif unique dans les garderies subventionnées, sans contribution supplémentaire. François Legault a entendu « le cri du coeur des retraités à bas revenus » lors de la campagne électorale et leur promet de l'aide « rapidement ».

SANTÉ: PAS DE « GRANDES PROMESSES »

Après les réformes Barrette, il n'y aura pas de « changements de structures » et de « bouleversements inutiles » dans le réseau de la santé. François Legault a signalé que sa ministre Danielle McCann et son équipe « vont éviter » également les « grandes promesses ». « On va avancer un pas à la fois, main dans la main avec les professionnels en soins et on va améliorer concrètement la situation » en matière d'accès aux services, a-t-il affirmé. Il veut implanter un nouveau mode de rémunération pour les médecins de famille pour favoriser davantage la prise en charge de patients.

Quant aux médecins spécialistes, leur niveau de rémunération doit être « équitable ». « Les travailleurs québécois, incluant ceux de la santé, ont un écart salarial négatif avec leurs homologues des autres provinces. » Il veut « procéder aux réajustements à partir des résultats » d'une étude indépendante sur la rémunération médicale à travers le pays. En campagne électorale, le chef caquiste disait vouloir réduire de 400 000 $ à 320 000 $ par année la rémunération d'un spécialiste. Il ambitionnait ainsi de récupérer 1 milliard de dollars. En matière de santé publique, un projet de loi sera présenté incessamment afin de hausser à 21 ans l'âge légal pour consommer du cannabis et interdire de fumer dans les lieux publics.

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FRANÇOIS LEGAULT SUR...

Les signes religieux

« Le port de signes religieux va être interdit pour les employés de l'État en position d'autorité, y compris les enseignants du primaire et du secondaire. Il s'agit d'une position raisonnable. On va donc être très fermes à ce sujet, et on a l'intention de bouger rapidement. »

L'immigration

« On doit débattre d'immigration calmement et sereinement, en évitant les accusations délirantes [...]. On doit éviter de regarder de haut, avec mépris, les inquiétudes légitimes de la population québécoise. [Notre] objectif est clair : on veut réduire les seuils d'immigration pour avoir les moyens de mieux intégrer les immigrants. »

Les nominations

« Les dirigeants de l'UPAC, de la Sûreté du Québec et de la Direction des poursuites criminelles et pénales vont être dorénavant nommés aux deux tiers des voix de l'Assemblée nationale. Ce sera le projet de loi numéro un du nouveau gouvernement. [...] On va mettre fin aux nominations partisanes. Les centaines de nominations effectuées sur la seule base de l'appartenance à un parti politique [...] ont affaibli l'État québécois. Désormais, c'est la compétence qui devient le critère fondamental. »

Les entrepreneurs

« J'ai un message pour les entrepreneurs québécois. [...] Votre gouvernement compte des dizaines d'entrepreneurs qui savent ce que vous vivez et qui veulent vous aider à faire avancer vos projets d'investissements. Sortez les projets de vos tiroirs, on va vous aider à les réaliser ! »

Son adversaire

« Si je devais identifier l'adversaire du gouvernement, ce serait la peur. La peur de se tromper, la peur de ne pas être capable, la peur du changement. Cette peur, c'est le contraire de l'audace. »

Son approche

« Un autre grand changement va venir de l'approche du nouveau gouvernement. Je suis déterminé à ne pas gouverner pour les groupes de pression, ni pour les syndicats ni pour le patronat. [...] Le nouveau gouvernement ne va pas être le gouvernement d'un groupe ou d'une idéologie. »