Malgré le mauvais temps, les Québécois sont venus en grand nombre rendre samedi un dernier hommage à l'ex-premier ministre Bernard Landry.

La dépouille de M. Landry, décédé mardi à l'âge de 81 ans des suites d'une longue maladie pulmonaire, était exposée toute la journée, de 10 h à 18 h, en chapelle ardente au Salon rouge de l'Assemblée nationale.

Toute la journée, dignitaires et citoyens ont défilé devant le cercueil recouvert du fleurdelysé, avant de présenter leurs condoléances aux proches du disparu, sa veuve, Chantal Renaud, et ses trois enfants, Julie, Philippe et Pascale, nés d'une union précédente avec la juge Lorraine Laporte, décédée en 1999.

Les gens venus se recueillir au Salon rouge devaient se montrer patients et attendre souvent de longues minutes avant de pouvoir s'approcher du cercueil.

À 13 heures, soit trois heures après l'ouverture des portes, déjà 400 personnes avaient pris part à la chapelle ardente.

Toute de noir vêtue, Mme Renaud leur tendait une main gantée de noir, ayant un bon mot pour chaque visiteur.

Une des filles de M. Landry, Pascale, a tenu à s'adresser aux médias pour remercier la population de la vague d'amour reçue depuis le décès de son père. « Ça nous réconforte énormément », a-t-elle dit, convaincue que ces témoignages d'affection vont aider la famille « à traverser cette épreuve ».

En tant qu'ancien premier ministre, M. Landry aura droit à des funérailles d'État, à la basilique Notre-Dame de Montréal, mardi à 14 h.

Les funérailles auront été précédées d'une autre chapelle ardente lundi, à la basilique Notre-Dame de Montréal, également de 10 h à 18 h.

Ancien ministre péquiste et compagnon d'armes de Bernard Landry pendant des années, le premier ministre François Legault était présent, tôt en matinée, en compagnie de son épouse, Isabelle Brais.

En point de presse en marge de l'événement, M. Legault a souligné l'influence qu'avait eue l'ancien premier ministre souverainiste sur son propre parcours politique.

À son contact, il dit avoir appris « ce que c'est être un homme d'État ».

« M. Landry le disait souvent : le parti avant les hommes, la patrie avant le parti. Et je l'ai vu souvent en pratique appliquer ces deux phrases. Pour lui, c'était toujours important de faire passer le bien commun avant l'intérêt partisan. [C'était] vraiment un homme de devoir », selon celui qui l'a bien connu.

Le premier ministre Legault a indiqué que le Québec devra certainement honorer la mémoire de Bernard Landry, mais qu'il était encore trop tôt pour dire de quelle façon.

Le legs d'un « géant »

Le chef par intérim du Parti québécois (PQ), que M. Landry a dirigé de 2001 à 2005, Pascal Bérubé, est venu lui aussi témoigner de l'importance de la contribution apportée par le disparu à l'essor du Québec pendant des décennies, un legs que les prochaines générations devront faire fructifier.

« Son esprit nous anime. Nous sommes tournés vers l'avenir en portant son héritage comme quelque chose de très précieux », a commenté M. Bérubé, en point de presse, qualifiant l'ancien chef du PQ de « géant » et d'« homme plus grand que nature » quand on pense au nombre et à l'importance de ses réalisations.

M. Bérubé a lancé un message de rassemblement à tous ceux qui pleurent aujourd'hui l'ancien politicien, qui avait fait de la souveraineté la cause de toute une vie.

« Le plus bel hommage qu'on peut lui rendre, c'est d'être fidèle à son engagement, d'être fidèle au rêve de jeunesse qu'il avait pour le Québec et que nous continuons à porter », a dit M. Bérubé.

L'ancien chef du PQ Pierre Karl Péladeau s'est présenté sur les lieux en début d'après-midi. Mme Renaud s'est avancée vers lui et lui a fait une longue accolade. Bernard Landry « aura milité [pour la souveraineté] jusqu'aux derniers moments de sa vie », a-t-il commenté par la suite.

Plusieurs autres députés péquistes et anciens députés et ministres ayant côtoyé M. Landry se sont déplacés, eux aussi, pour faire leurs adieux : les Sylvain Gaudreault, Véronique Hivon, Marc-André Bédard, Rodrigue Biron, Denis de Belleval, Lucien Lessard, Matthias Rioux, Linda Goupil, Agnès Maltais.

« Les gens sont en train de reconnaître quel est ce legs à multiples facettes » laissé par M. Landry, a commenté l'ex-ministre péquiste Agnès Maltais, convaincue que le disparu deviendra « une source d'inspiration » pour les prochaines générations.

D'autres personnalités ont défilé au Salon rouge durant la journée, parmi lesquelles figuraient notamment le député fédéral Gérard Deltell, l'avocat et ancien artisan du mouvement souverainiste, Guy Bertrand, le lieutenant-gouverneur J. Michel Doyon, l'ex-ministre libéral Clément Gignac et la consule générale de France à Québec, Laurence Haguenauer.

Cette dernière, qui dit avoir eu « la grande chance de le rencontrer » a fait valoir toute l'importance que revêtait la relation France-Québec aux yeux de l'ancien premier ministre, qui avait étudié et vécu à Paris durant ses jeunes années.

« C'est un grand homme d'État que le Québec a perdu, un ami, un constructeur, un bâtisseur de la relation entre la France et le Québec que nous avons tous perdu », a-t-elle fait remarquer, lors d'un bref point de presse.

L'opposition officielle libérale était représentée par son leader parlementaire, le député de Jean-Talon et ex-ministre de l'Éducation, Sébastien Proulx.

« Je veux saluer tout le travail qu'il a fait, saluer cet héritage également, et souhaiter qu'il y ait encore des hommes comme lui et des femmes comme lui qui s'engagent à l'avenir dans la politique québécoise », a-t-il commenté.

Militant souverainiste jusqu'à son dernier souffle, Bernard Landry a été premier ministre du Québec de 2001 à 2003, après avoir été un super-ministre dans les gouvernements de Lucien Bouchard, René Lévesque et Jacques Parizeau.

Les drapeaux du Québec ont été mis en berne mardi et le resteront jusqu'à la tenue des funérailles.

Photo Marco Campanozzi, archives La Presse

Bernard Landry est décédé mardi à l'âge de 81 ans des suites d'une maladie pulmonaire.