Le gouvernement Couillard va renoncer à son projet de nommer un civil à la tête de la Sûreté du Québec. Seul un candidat issu des rangs de la police sera à même, convient-on, de mobiliser les troupes au moment où la SQ doit absorber des coupes importantes de budget, comme l'ensemble des autres organismes.

Nouveau contexte budgétaire oblige, au bunker de Parthenais, la police ne pourra cette fois éviter de coopérer, prévient-on au gouvernement. Le ministère de la Sécurité publique vient de passer le message à l'ensemble des organismes qui relèvent de lui. Québec décrète une coupe paramétrique de 3% de la masse salariale, une cible présentée comme incontournable. Pour la SQ, dotée de près de 6000 policiers, cela représente une diminution de 20 millions de la masse salariale, sur un budget total de 600 millions. Le même message a été passé aux services correctionnels. Déjà, au seuil de l'exercice financier, la SQ avait été sommée de pratiquer des coupes 18,5 millions. On frôle les 40 millions pour 2014-2015.

Confrontation à prévoir

Une confrontation est à prévoir, puisque la direction de la SQ doit rencontrer formellement sous peu l'Association des policières et policiers provinciaux du Québec. Son président Pierre Veilleux réclame comme ses prédécesseurs une augmentation de 200 patrouilleurs, qui ne saurait être envisagée par Québec.

Autre message passé à Luc Fillion, le patron intérimaire de la SQ depuis le départ de Mario Laprise à la fin d'août, la police devra s'astreindre à un gel des embauches. Les départs à la retraite ne seraient pas remplacés. Des sources à la Sécurité publique conviennent toutefois que cette règle n'est pas immuable: «Ce ne sera pas zéro, c'est impossible, de nouveaux contingents doivent arriver sous peu», résume-t-on.

Mais ces compressions supposent tout un changement de culture à la Sûreté du Québec, qui, au fil des ans, est parvenue à affronter les vagues d'austérité gouvernementales sans trop de dommages. L'organisation est un peu «dans le trèfle», indique-t-on. En conséquence, la «dotation» du nombre de postes d'encadrement et leur niveau devront être revus.

Cette situation amène le gouvernement à mettre de côté son projet de nommer un civil à la tête de la police provinciale, une idée avalisée chez Philippe Couillard, où on avait gardé un arrière-goût amer des perquisitions au PLQ ébruitées rapidement dans les médias et la rencontre impromptue de deux limiers avec M. Couillard, alors chef de l'opposition.

Seulement deux civils

Dans son histoire, la SQ avait eu seulement deux civils à sa tête: Guy Coulombe, un mandarin hors norme, avait été envoyé à Parthenais au terme de la commission d'enquête Poitras, qui avait levé le voile sur de nombreuses bavures policières. Le gouvernement Bouchard avait plus tard nommé un second civil, l'ancien sous-ministre à la Sécurité publique, Florent Gagné, réapparu récemment comme responsable de la tutelle à la Ville de Laval.

Avec la période difficile qui s'annonce à la SQ, un dirigeant issu des rangs de la police sera plus à même de mobiliser les troupes autour des objectifs du gouvernement. Innovation, Québec a mandaté un comité d'experts, de juristes et d'anciens policiers pour évaluer diverses candidatures. Le groupe doit se prononcer en novembre au plus tard.