Toute la journée hier, Jean Charest, coprésident du camp du Non en 1995, a multiplié les formules pour convaincre les souverainistes de se rallier à lui. Il a même parlé de son «Oui inclusif», en référence à son slogan de campagne. Il a demandé un mandat fort afin de «se dresser» devant le gouvernement fédéral et défendre les intérêts du Québec. Il est allé jusqu'à dire qu'«il n'y a plus de couleurs politiques» le lendemain du scrutin en raison du contexte économique qui commande l'union de tous les Québécois.

«Je ne dis pas aux gens de mettre de côté leur rêve. Je leur demande de travailler avec nous pour faire face à un enjeu économique qui aura un impact important sur la vie des Québécois, a-t-il affirmé lors d'un point de presse pour expliquer son appel aux souverainistes. L'enjeu économique est tellement important à court terme qu'il transcende les autres.» Quelques minutes plus tôt, devant plus d'un millier de militants réunis dans la capitale nationale, Jean Charest invitait les Québécois de toute allégeance à l'appuyer aujourd'hui. Il visait tout particulièrement «les souverainistes». «Joignez-vous donc à une équipe pour qui l'avenir du Québec, c'est plus que le statut du Québec à l'intérieur du Canada, mais pour qui l'enjeu réel est la stature du Québec dans le monde», a-t-il lancé.

Après cette sortie, les ministres Sam Hamad et Yves Bolduc, qui attendaient le point de presse de leur chef, sont restés pantois. «On va attendre M. Charest, je pense que c'est la seule chose qu'on doit faire», a affirmé le Dr Bolduc.

En après-midi, à Shawinigan, dans la circonscription de Saint-Maurice, Jean Charest en a remis. Il a insisté sur le «Oui» de son slogan de campagne, un mot qu'il a emprunté aux souverainistes. «Le Oui que nous voulons, c'est un Oui qui est inclusif, qui nous permet d'être unis les uns aux autres pour faire face» à la tempête, a-t-il affirmé.

«Il ne faut pas se gêner pour dire aux souverainistes qu'on veut travailler avec tout le monde. On respecte l'opinion de tout le monde. Mais cette tempête aura un impact sur tous peu importe leur allégeance politique. Il y a plus de choses qui nous unissent que de choses qui nous divisent dans notre société», a ajouté le chef libéral, qui a terminé sa journée à Granby.

Marois «estomaquée»

De son côté, Pauline Marois estime que l'appel de Jean Charest aux souverainistes prouve que le premier ministre «voit le tapis lui glisser sous les pieds» à l'approche du vote.

La chef du PQ a été si «estomaquée» par la sortie de son adversaire libéral qu'elle a tenu un point de presse imprévu à la fin de sa dernière journée de campagne, hier. Elle s'en est prise à ce qu'elle considère comme une preuve de l'arrogance de M. Charest.

«Ça correspond au personnage de croire que tout lui est permis», a-t-elle raillé, doutant que les souverainistes voteront pour celui qu'elle surnomme «Capitaine Canada».

Même si son parti n'entend pas tenir de référendum sur la souveraineté, Mme Marois estime être la seule à pouvoir défendre les intérêts du Québec.

«Nous allons gouverner en souverainistes, nous allons faire avancer le Québec sur la question de la langue, nous donner une Constitution et réclamer des pouvoirs vis-à-vis Ottawa et, comme militants, remobiliser les gens autour du projet de souveraineté.»

Interrogée sur ce qu'elle avait à offrir aux électeurs fédéralistes, Pauline Marois a répondu: «J'ai à offrir une expérience solide, un plan d'action concret et le fait que le Québec va se tenir debout vis-à-vis Ottawa et va réclamer son dû. Tous les fédéralistes québécois souhaitent que leur premier ministre se tienne debout et ça n'a pas été le cas avec M. Charest.»