Convaincre un électeur d'acheter le programme d'un parti politique en 30 secondes, c'est possible? Difficile, mais pas hors de portée s'il s'agit d'un indécis.

C'est quand le coeur d'un électeur balance qu'il est le plus favorable aux campagnes de publicité menées par les partis politiques, révèle une étude menée par des chercheurs de l'Université Laval. Marie-Claude Tremblay a mesuré en temps réel la réaction de 301 personnes pendant qu'elles visionnaient les publicités des partis fédéraux diffusées lors de l'avant-dernière campagne fédérale, en 2006. Les téléspectateurs devaient qualifier de 0 à 100 leur appréciation du discours vu et entendu.

Étonnament, les personnes qui s'intéressent le moins à la politique - et souvent moins déterminées dans leurs choix - sont aussi celles qui ont donné les meilleurs scores à ces capsules et qui ont le plus apprécié les opérations de séduction des politiciens. «Ils sont moins portés à analyser de façon critique le message pour se faire une opinion», explique Marie-Claude Tremblay. À l'opposé, les cyniques sont plus durs à convaincre et jugent beaucoup plus sévèrement les images, les paroles et les musiques destinées à les amadouer. En bref, les pubs les irritent.

Alors qu'une nouvelle campagne électorale pourrait être déclenchée bientôt à Ottawa, Marie-Claude Tremblay sert un conseil aux stratèges: «Évitez les propos négatifs: ils stimulent le cynisme des électeurs.» Et un électeur cynique est un électeur qui a moins tendance à juger utile de se déplacer jusqu'à un bureau de scrutin. Le discours négatif aurait donc exactement l'effet contraire de celui qui devrait être recherché! Idem pour les slogans misant sur la peur.

Autre défi, les stratèges doivent trouver le juste équilibre entre le côté nature et le côté givré des politiciens, car les électeurs ne se laissent pas seulement conquérir par les émotions, mais aussi par la raison. Gagner un vote, c'est gagner le coeur et la tête d'un citoyen. «Les arguments rationnels augmentent la crédibilité du message et son efficacité, mais les émotions piquent l'intérêt. Il faut donc utiliser les deux», tranche Mme Tremblay.

Reste que les campagnes de publicité lancées à grands frais n'ont qu'une efficacité toute relative. «Elles servent surtout à ramener à l'avant-plan certains enjeux ou ramener les électeurs vers leurs prédispositions naturelles», constate Mme Tremblay.