Le gouvernement fédéral est responsable des évaluations environnementales des pipelines interprovinciaux, mais la réalisation des oléoducs proposés par Enbridge et TransCanada dépend aussi de l'appui de Québec, affirme la ministre des Ressources naturelles, Martine Ouellet.

L'automne dernier, le ministre des Ressources naturelles, Joe Oliver, a indiqué qu'Ottawa a la responsabilité constitutionnelle d'évaluer les projets de pipelines vers le Québec par l'entremise de l'Office national de l'énergie. En entrevue téléphonique, son homologue rappelle que Québec aura aussi son mot à dire.

« Dans le cas du projet d'Enbridge et dans le cas du projet de TransCanada, l'appui ou non du gouvernement du Québec est assez déterminant pour le succès du projet », dit-elle.

Québec compte analyser le projet Energy East, annoncé mardi par TransCanada, et qui pourrait acheminer jusqu'à 850 000 barils de pétrole par jour sur le territoire québécois. La ministre souhaite en déterminer les impacts environnementaux et les retombées économiques avant de prendre position.

Elle note que le projet de TransCanada est bien différent de celui présenté l'automne dernier par Enbridge. Le premier prévoit la construction de 1400 kilomètres de nouvelles conduites, en grande partie sur le territoire québécois. L'autre consiste à inverser le flux d'un oléoduc déjà existant entre Sarnia et Montréal.

Mme Ouellet convient que les raffineries québécoises bénéficieront de l'arrivée de brut de l'Ouest canadien. Les installations de Suncor à Montréal et d'Ultramar à Lévis doivent présentement importer le pétrole qu'elles transforment à un prix beaucoup plus élevé. Shell a fermé sa raffinerie il y a deux ans.

Mais la ministre exprime aussi des réserves sur l'arrivée au Québec du brut dérivé des sables bitumineux. Dans son étude sur le projet Keystone XL, le département d'État américain a récemment estimé que ce pétrole génère des émissions de gaz à effet de serre 17% plus élevées que du brut conventionnel lorsqu'on tient compte de l'ensemble de son cycle de production.

« Je ne vais pas vous le cacher, on a une préoccupation quant à la provenance du pétrole, dans ce cas-ci du pétrole non-conventionnel qui émet plus de gaz à effet de serre que du pétrole conventionnel qu'on importe présentement dans les raffineries du Québec », indique-t-elle.

L'entreprise en est toujours à mesurer l'intérêt de ses clients potentiels, c'est-à-dire les raffineries. C'est pourquoi la nature et le tracé de son projet pourraient changer au cours des prochains mois, explique Mme Ouellet.

Ultramar

La raffinerie Ultramar, la plus grosse au Québec, voit d'un bon oeil l'arrivée de pétrole de l'Ouest canadien, mais n'a pas pris position sur le projet de TransCanada, mercredi.

Le porte-parole d'Ultramar, Michel Martin, rappelle que l'entreprise appuie le projet d'Enbridge d'inverser son pipeline entre Sarnia et Montréal. Il note aussi que le projet de TransCanada est à un stade beaucoup moins avancé que celui de son concurrent.

« Au niveau du principe, du concept, c'est une bonne nouvelle, a noté M. Martin. Mais au niveau des aspects spécifiques du projet, nous n'avons pas pris position. »

Un baril de pétrole canadien se transige jusqu'à 20$ moins cher qu'un baril de Brent, l'indice phare des marchés mondiaux. C'est une économie de taille pour une raffinerie ayant une capacité de 265 000 barils par jour.