Président-directeur général de La Maison Simons, Peter Simons n'a pas gagné de prix particulier, cette semaine, pas de médaille olympique ni de doctorat honoris causa. Mais La Presse a tenu à souligner l'audace et le courage dont il a fait preuve en lançant deux grands projets dont le but est de consolider le marché de la vente au détail au Québec.

D'abord, jeudi, celui qui s'est fait le champion du soutien à la croissance des entreprises québécoises, à l'heure du commerce électronique venu du sud, a annoncé l'ouverture d'un nouveau grand magasin dans l'Ouest-de-l'Île, un 16e pour la chaîne. Il sera construit à Pointe-Claire, aux deuxième et troisième étages d'un ancien Sears, un projet de 100 000 pieds carrés qui se préparait depuis « des années » avec Cadillac Fairview et Ivanhoé Cambridge, explique l'homme d'affaires de 54 ans, en entrevue.

Mais surtout, la semaine dernière, Simons et le gouvernement du Québec ont rendu public un vaste projet de modernisation du traitement des commandes de la chaîne. Le but : mettre en place un système à la fine pointe de la technologie qui permette une gestion ultra efficace des stocks et un service de vente en ligne prêt à faire concurrence aux géants américains.

Pour ce plan audacieux, La Maison Simons a ouvert sa propriété à la Caisse de dépôt et à Investissement Québec et a aussi été chercher l'appui du fonds immobilier de la FTQ. En tout, l'entreprise a réussi à glaner 145 millions en plus de ses propres investissements pour un projet qui totalise 215 millions et porte à 450 le nombre d'emplois.

« Le travail commence. C'est un gros projet, je suis fébrile. Mais confiant [en notre capacité de réussir]. »

Accélérateur d'entreprises

Parce qu'en plus du centre de traitement des commandes, il y aura aussi un « accélérateur », soit un centre d'aide et de soutien aux jeunes entreprises qui ont besoin d'aide technique et pratique.

L'homme d'affaires de Québec, qui fait partie de la cinquième génération de commerçants dans sa famille - La Maison Simons a été fondée en 1840 et est fière d'être l'une des plus anciennes entreprises familiales au Canada - ne trouve pas tout à fait juste qu'on le nomme lui « personnalité de la semaine ». « En fait, ça devrait être l'équipe de la semaine », dit-il. Parce que tous ces projets ne se feraient pas sans tous ceux qui l'entourent et qui travaillent ensemble pour mettre de l'avant ce qu'il appelle, tout simplement : « un bon plan ».

Plusieurs fois durant l'entrevue, il reviendra à cette idée. Ceci n'est pas l'affaire d'une seule personne, mais le fruit de la convergence de toutes sortes d'expertises, de gens qui travaillent bien ensemble.

« Ça fait partie des choses que j'ai apprises de mon père, qui de toute évidence aimait son travail. Et qui croyait à l'importance de créer des entreprises de qualité. Ce n'était pas la taille qui comptait pour lui. C'était la qualité. »

Dans la famille Simons, parlait-on beaucoup affaires ?

« Ce qui m'a marqué, c'est qu'il y avait beaucoup de discussions sur l'esthétique, la créativité. Il y avait une grande sensibilité à la nouveauté, à l'innovation. Et aussi aux rôles des entreprises dans la communauté, pour appuyer notamment la culture. »

Pour Peter Simons, il n'a d'ailleurs jamais été question de déménager ailleurs qu'à Québec, où la famille est installée depuis toujours. « Pourquoi je changerais ? », demande-t-il. « Québec a beaucoup d'atouts pour sa qualité de vie. On est bien ici. Nos racines sont ici. »

Une loyauté importante

L'homme d'affaires convient que certaines choses seraient peut-être plus faciles s'il allait à Montréal, où sont notamment les partenaires bancaires de la société. « Mais la loyauté des gens d'ici, c'est important. C'est souvent sous-estimé en affaires », dit-il, avant de raconter qu'il vient de souligner les 40 ans d'ancienneté de l'un de ses employés.

Si la tradition est si importante, compte-t-il sur ses enfants pour poursuivre la lignée Simons à la tête de la chaîne de grands magasins ?

« Ils commencent doucement à s'y intéresser », dit le père de deux enfants de 15 et 17 ans. Mais il n'a pas l'intention d'exercer sur eux quelque pression que ce soit pour qu'ils se dirigent vers le commerce. « L'important, c'est qu'ils trouvent quelque chose qu'ils aiment faire », dit-il. « Ils ont tellement de potentiel, je veux leur donner la liberté, j'ai peur de mettre ce poids sur leurs épaules. » Il veut qu'ils trouvent leur propre voie.

Parce que, demande-t-il en terminant, « faire ce qu'on aime, n'est-ce pas l'essence même du bonheur ? »

Peter Simons en quelques choix

DEUX LIVRES

Why Liberalism Failed, de Patrick Deneen, et Master Algorithm, de Pedro Domingos

UN FILM

« Je préfère les livres, alors j'en choisis un autre : Homo Deus - Une brève histoire de l'avenir, de Yuval Noah Harari. »

UN PERSONNAGE HISTORIQUE

Samuel de Champlain. « Il avait une vraie vision multiculturelle bien avant son temps. Un désir de trouver une façon de vivre ensemble qui nous rend plus forts. »

UN PERSONNAGE CONTEMPORAIN

Martin Luther King

UNE PHRASE

« Il faut toujours viser la lune, car même en cas d'échec, on atterrit dans les étoiles », d'Oscar Wilde.

UNE CAUSE QUI VOUS FERAIT DESCENDRE DANS LA RUE

« L'accès des enfants à une éducation de qualité. Et sur ma pancarte, j'écrirais : "Une éducation ratée est une génération perdue." »