À quoi mesure-t-on un héros? Dans l'histoire de David contre Goliath, l'héroïsme est personnifié par un homme qui se dresse contre plus grand que soi pour le bien de tous, malgré les risques qu'affronter un géant implique.

En ce sens, Magog a son propre héros, Omer Girard, mort samedi dernier à l'âge de 92 ans. Le cofondateur de l'Association canadienne de télévision par câble est surtout connu pour son combat contre le Goliath des télécommunications des années 70, Bell Canada.

La victoire a mérité à Omer Girard en 2012 une place aux côtés d'Alexander Graham Bell au Temple de la renommée des Télécommunications du Canada, et le titre populaire de héros de Magog. «Mon père est décrit comme le personnage le plus influent de l'histoire de Magog, indique fièrement Marc Girard, fils du pionnier. C'est quelqu'un de très aimé.»

La guerre des poteaux

Dans les années 50 et jusqu'aux années 70, le géant Bell exigeait des sommes astronomiques pour l'accès à ses poteaux téléphoniques tout en conservant les droits de propriété. Les temps étaient durs pour les petites compagnies de câblodistribution qui fournissaient leur communauté en télévision, comme Transvision Magog, fondée en 1957 par Omer Girard.

«La câblodistribution, c'était nouveau, explique Marc Girard. Bell demandait aux compagnies d'ériger leurs propres poteaux. Imaginez, si on avait des poteaux pour chaque fournisseur!»

Omer Girard se battait pour l'accès libre aux infrastructures. En décembre 1972, Bell coupe une partie des lignes de Transvision Magog, privant quelque 200 abonnés de télévision moins d'une semaine avant Noël.

Bell pensait contraindre Omer Girard à signer un contrat qu'il l'aurait rabaissé au rôle de sous-traitant. Il ne signe rien et photographie plutôt la scène. Le lendemain, Bell est dépeint comme un voyou dans les journaux canadiens d'un océan à l'autre. Une injonction du tout jeune Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications (CRTC) oblige Bell à rebrancher deux jours plus tard.

M. Girard gagne son combat contre Bell en 1975. «Il a fini par gagner et le CRTC a changé le règlement, relate son fils. Puisque les poteaux transportaient les télécommunications, il y a eu un partage obligé des infrastructures qui sont devenues des biens publics. Ça a donné des ailes à la câblodistribution.»

Les prix Omer

Omer Girard était passionné de technologie depuis son service dans l'Aviation royale du Canada durant la Deuxième Guerre mondiale. «Mon père faisait halluciner tout le monde! s'exclame Marc Girard. Il pouvait parler de n'importe quoi, il pouvait monter un logiciel!»

Omer Girard aura succombé à un cancer. Il laisse une marque indélébile dans le milieu des télécommunications et la ville de Magog. La chambre de commerce et d'industrie de Magog-Orford, fondée par Omer Girard en 1961, remettra à son tout premier gala la semaine prochaine des prix nommés Omer.

M. Girard laisse cinq enfants, neuf petits-enfants et onze arrière-petits-enfants.

Le service funèbre a eu lieu vendredi dernier à Magog.