Enseignante dévouée, militante et politicienne, Claudette Boyer a été la première femme francophone élue députée à l'Assemblée législative de l'Ontario. Avec le trille blanc du drapeau franco-ontarien tatoué sur le coeur, la directrice générale de l'Association des communautés francophones d'Ottawa a toujours été rigoureusement engagée dans sa communauté. Elle s'est éteinte le 16 février à l'âge de 75 ans, victime d'une hémorragie intracrânienne.

Née à Ottawa en 1938, Claudette Boyer a grandi dans le magasin général que tenaient ses parents dans la basse-ville. Enseignante de carrière, la mère de trois enfants a travaillé comme conseillère scolaire et auprès de diverses associations d'enseignants pendant près de 30 ans. «Les enfants s'épanouissaient avec elle. Elle leur faisait faire des spectacles. Elle était comme une mère pour eux», relève Ginette Gratton, productrice et animatrice de télévision et amie de longue date.

Son dévouement envers la jeunesse et la francophonie est louangé de toutes parts. «C'est un peu comme si les Franco-Ontariens perdaient leur grand-maman», ajoute Mme Gratton. La femme était effectivement de toutes les causes touchant l'éducation et l'accès aux services en français. «Elle a eu un impact considérable sur la gestion et la construction d'écoles francophones. Elle a aussi participé aux grandes luttes comme celles de l'hôpital Montfort ou du bilinguisme à Ottawa. Son travail rayonnait dans toute la province», atteste Madeleine Meilleur, ministre déléguée aux Affaires francophones.

«C'était une francophone jusqu'au bout des orteils, renchérit son amie Tréva Cousineau, qui assure la direction par intérim de l'Association des communautés francophones d'Ottawa (ACFO). Si je disais un mot d'anglais, elle me chicanait!»

Politicienne née

Libérale convaincue, Claudette Boyer a notamment été directrice de campagne pour Bernard Grandmaître et Jean-Robert Gauthier. Puis, l'appel s'est fait plus fort: elle se lance en politique en 1999 et devient la première femme francophone à être élue à Queen's Park. «C'était son grand rêve. Claudette était une politicienne née. Elle ne comptait pas ses heures», relate Tréva Cousineau, qui a été son adjointe administrative à Toronto.

Souhaitant briguer plus d'un mandat, la politicienne a dû revoir ses objectifs à la baisse. En 2000, elle se fait expulser du caucus libéral après avoir été accusée d'entrave à la justice dans une affaire impliquant son conjoint. «Je suis d'avis, comme plusieurs, que cette expulsion a été sévère. Malgré tout, Claudette a retroussé ses manches et a continué à siéger comme indépendante de manière honnête et efficace», souligne Mauril Bélanger, député fédéral d'Ottawa-Vanier.

Malgré ces revers, la politicienne qui s'est retirée de la vie politique en 2003 a toujours pu compter sur l'appui de son entourage. «Elle avait un réseau incroyable composé d'anciens collègues, de parents et même d'anciens élèves qui l'appuyaient loyalement», énonce M. Bélanger.

De son passage en politique, plusieurs retiendront qu'elle aura été l'instigatrice d'un geste hautement symbolique: l'adoption du drapeau franco-ontarien à Queen's Park, tel que déposé par Jean-Marc Lalonde et adopté en 2001.

Organisatrice hors pair

Après avoir touché à son rêve politique, Claudette Boyer poursuit son travail sociocommunautaire dans divers organismes et devient directrice générale de l'ACFO en 2007. À ce poste, elle a notamment participé à plusieurs célébrations franco-ontariennes et a été l'initiatrice des états généraux de la francophonie d'Ottawa.

«Il y avait la femme attentionnée, loyale, l'amie qui vous regarde avec plein d'amour dans les yeux. Et il y avait la femme d'action, l'organisatrice hors pair, qui travaillait dans une montagne de papiers et de boîtes et qui s'y retrouvait malgré tout... Comme un petit général, elle donnait ses ordres. Claudette nous tenait debout jusqu'à 3h du matin à souffler des ballons et à préparer des discours», se remémore affectueusement Ginette Gratton.

Même limitée dans ses déplacements par des soucis de santé, Claudette Boyer a travaillé jusqu'à la toute fin à honorer les siens, alors qu'elle s'activait aux derniers préparatifs de la soirée du prix Bernard-Grandmaître qui se déroulera, sans elle, ce soir. «Elle est partie comme elle l'aurait probablement souhaitée: dans le feu de l'action à faire ce qu'elle aimait», termine Tréva Cousineau.

Ses funérailles auront lieu le 26 février à Ottawa.