Il s'est constitué un royaume à partir d'une vieille relique abandonnée dans la mer du Nord au large des côtes de l'Angleterre. Prince et chef d'État autoproclamé de la micronation du Sealand de 1967 à 1999, Paddy Roy Bates s'est éteint le 9 octobre. L'excentrique personnage avait 91 ans.

En 1966, l'ancien major de l'armée britannique s'établit avec sa famille sur une plate-forme qui avait été érigée par les Anglais pendant la Seconde Guerre mondiale pour protéger l'estuaire de la Tamise contre la Wehrmacht.

Son objectif était d'y créer une radio pirate. Un an plus tard, pour des motifs inconnus, les Bates se donnaient un drapeau et déclaraient leur souveraineté au grand dam du gouvernement britannique. La principauté de Sealand, d'à peine 550 m2, voyait le jour. Son statut de plus petit État au monde n'a cependant jamais été reconnu par aucun gouvernement.

Paddy Roy Bates est mort lundi dans une résidence pour personnes âgées à Leigh-on-Sea, dans l'est de l'Angleterre. Selon ses proches, le chef de Sealand souffrait depuis quelques années de la maladie d'Alzheimer. Il laisse dans le deuil sa conjointe Joan, son fils Michael et sa fille Penny.

Hors des eaux

Le souverain a vécu dans son royaume, composé de deux gigantesques colonnes de béton reliées par une plate-forme d'acier, jusqu'au tournant des années 2000. Son fils Michael, qui vit aujourd'hui en Espagne, a été nommé prince et digne héritier en 1999.

«M. Bates a profité d'une lacune juridique pour mettre la main sur ces vieilles installations militaires et proclamer l'indépendance de la plate-forme. Elle était à l'extérieur des eaux territoriales de l'Angleterre, ce qui jouait à l'avantage de M. Bates. Même un juge anglais lui a donné raison», explique Frédéric Lasserre, professeur de géographie à l'Université Laval.

M. Lasserre s'intéresse au phénomène des micronations depuis des années. Il a écrit plusieurs articles sur le sujet. Il existerait, en Occident seulement, pas moins de 350 micronations, dit-il.

Monnaie, timbres et passeport

Selon lui, «prince Roy» était un homme qui cherchait avant tout à se divertir. «Ses ambitions semblaient sincères au début, comme c'est le cas chez la plupart des gens qui créent des micronations virtuelles ou réelles. Mais, dans le cas de M. Bates, il y a eu une dérive affairiste où il a cherché à tirer profit de son territoire à travers des activités commerciales et bancaires plus ou moins louches», soutient le chercheur universitaire.

Désireux de légitimer leur principauté, les «Sealandais» ont créé leur propre monnaie dès 1975. Ils ont par la suite eu un hymne national, des timbres et un passeport. Plusieurs tentatives de prise de possession de Sealand ont eu lieu, mais sans succès.

À une certaine époque, Paddy Roy Bates a cherché à transformer son royaume en paradis fiscal. Aujourd'hui, la principauté tire ses revenus en vendant des titres aristocratiques et en hébergeant des serveurs internet.

Selon le site Wikipédia, Sealand aurait été mise en vente de 2007 à 2010. Prix demandé : 906 000$ US. Aussi, un casino virtuel (Sealand Online Casino) devrait y être installé à la fin de 2012.

Avec la collaboration d'ABC News et Associated Press