Le pape François a surpris le monde vendredi en présentant des excuses aux Autochtones canadiens réunis au Vatican. Certains ont regretté qu’il se soit limité à « demander pardon à Dieu » pour « la conduite déplorable de membres de l’Église catholique ». Mais les leaders autochtones se sont déclarés satisfaits de ces excuses.

« J’ai senti en lui une indignation », a dit Mandy Gull-Masty, grande cheffe du Grand Conseil des Cris du Québec, en téléconférence de presse de Rome. « Sa déclaration la plus importante pour moi a été de dénoncer les efforts pour inculquer un sens d’infériorité à mon peuple et à lui voler sa culture. » Tout au long de la semaine, les délégués autochtones ont déclaré préférer que le pape présente ses excuses lors de son voyage au Canada prévu plus tard cette année.

La Presse a demandé à Mme Gull-Masty si elle aurait aimé recevoir des excuses au nom de l’Église universelle. « Dans son message, il a touché un peu partout, pas seulement les membres de l’Église catholique, mais aussi le colonialisme, a répondu la cheffe de Waswanipi. Pour moi, c’est tout le monde qui a joué un rôle, pas seulement l’Église, pas seulement lui. »

  • Le pape François a tenu une audience devant les délégations des Métis, des Inuits et des Premières Nations vendredi au Vatican.

    PHOTO FOURNIE PAR LE VATICAN, LA PRESSE CANADIENNE

    Le pape François a tenu une audience devant les délégations des Métis, des Inuits et des Premières Nations vendredi au Vatican.

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L’Assemblée des Premières Nations (APN) avait demandé avant d’arriver à Rome la répudiation formelle de la « doctrine de la découverte » et de bulles papales, des documents juridiques datant de la Renaissance. Ces bulles papales ont attribué aux diverses puissances européennes le droit de prendre possession des terres des Autochtones et de convertir ces derniers au christianisme.

Raymond Poisson, évêque de Saint-Jérôme et président de la Conférence des évêques catholiques du Canada, estime que beaucoup de recherches dans les archives du Vatican seront nécessaires pour répondre à cette demande. « “Doctrine de la découverte”, c’est un terme américain, a dit Mgr Poisson en entrevue de Rome. Ce n’est pas une doctrine au sens catholique, quelque chose à quoi tous les croyants doivent adhérer. Nous allons voir s’il y a des bulles papales à répudier. Il pourrait aussi y en avoir d’autres qui ont défendu les peuples autochtones. »

Qu’en pense Mme Gull-Masty ? « J’apprécie les mots de Mgr Poisson, a-t-elle répondu. Le pape a parlé de dialogues, pour voir comment ils peuvent travailler sur ça. C’est une grosse job, ça ne sera pas fait en une semaine. »

Colonialisme idéologique

Le pape a aussi profité de sa déclaration de vendredi pour dénoncer le « colonialisme idéologique » dont ont été victimes les Autochtones, qui se poursuit encore aujourd’hui, selon lui. François a souvent utilisé ce terme pour dénoncer les efforts de l’Occident pour imposer ses normes progressistes, notamment en ce qui concerne les discussions sur le genre et le racisme, au monde entier. « Parfois, ça permet de défendre une certaine conception de la famille », note Philippe Vaillancourt, fondateur du site d’information religieuse Présence.

Les trois délégations autochtones – l’APN, les Inuits et les Métis – ont rencontré chacune de leur côté le pape cette semaine, avant de se réunir avec lui et tous leurs accompagnateurs vendredi. « Ça s’est très, très bien passé même si le pape ne parle pas anglais », a dit Mgr Poisson. François a écouté des témoignages d’anciens élèves inuits et métis des pensionnats, et a eu des discussions de deux heures, plus politiques et spirituelles, avec l’APN.

La conférence de presse commune des Autochtones vendredi s’est d’ailleurs conclue par une prière d’une représentante métisse albertaine, Angie Crerar, qui a aussi été une élève des pensionnats. « Le pape s’est souvenu aujourd’hui de ce que je lui ai dit lundi », a déclaré avec émotion Mme Crerar, qui a conclu sa prière d’un signe de croix.

Regardez l’audience du pape François avec les délégations autochtones (en anglais et en français) Lisez la déclaration du pape François (en anglais)

L’importance de sainte Anne

« Penser à la vénération présente chez beaucoup d’entre vous pour sainte Anne, la grand-mère de Jésus, me remplit de joie. Cette année, j’aimerais être avec vous à cette occasion. » Le pape faisait référence aux célébrations de la fête de Sainte-Anne, le 26 juillet, au sanctuaire du lac Sainte-Anne, en Alberta. Pourquoi cette vénération est-elle répandue chez les autochtones canadiens ? « Tout d’abord, il y avait une dévotion à sainte Anne dans l’ouest de la France au XVIIe siècle, explique Philippe Vaillancourt. Le sanctuaire de Sainte-Anne-de-Beaupré était déjà fréquenté par des Autochtones à cette époque. La réfection du toit de la troisième église à ce sanctuaire a même été payée par des Autochtones, en peaux de castor, au XVIIIe siècle. Il semble que la personnalité de sainte Anne avait des échos culturels chez les Autochtones. » Sainte Anne n’est pas mentionnée dans la Bible, mais par le Protévangile de saint Jacques, document du IIe siècle qui raconte notamment la vie de la Sainte Famille avant la naissance de Jésus, selon M. Vaillancourt.

Quelques déclarations du Vatican au sujet de l’Église et des peuples autochtones

2022

J’éprouve de la honte et de la douleur pour le rôle que certains catholiques, en particulier ceux qui avaient des responsabilités éducatives, ont eu dans tout ce qui vous a blessés, dans les sévices et dans le manque de respect envers votre identité, votre culture et même vos valeurs spirituelles.

Discours du pape François, le vendredi 1er avril, devant les délégations autochtones canadiennes

2021

À maintes reprises, tant mes prédécesseurs que moi-même avons demandé pardon pour les péchés personnels et sociaux, pour toutes les actions ou omissions qui n’ont pas contribué à l’évangélisation.

Déclaration du pape François à l’occasion du 500e anniversaire de la conquête de l’empire aztèque par les conquistadors espagnols

2015

Je vous le dis avec regret : beaucoup de péchés graves ont été commis contre les peuples autochtones d’Amérique au nom de Dieu. Je demande humblement pardon, non seulement pour les offenses de l’Église elle-même, mais aussi pour les crimes commis contre les peuples autochtones lors de la soi-disant conquête de l’Amérique.

Discours du pape François en Bolivie

2009

Vu les souffrances que certains enfants indigènes ont connues dans des pensionnats canadiens, le pape a exprimé son chagrin pour l’angoisse provoquée par la conduite déplorable de certains membres de l’Église et offert sa sympathie et sa solidarité dans la prière.

Communiqué du Vatican à l’occasion d’une rencontre à Rome entre une délégation de l’Assemblée des Premières Nations et le pape Benoît XVI

1992

Comment l’Église pourrait-elle oublier […] les souffrances énormes infligées aux habitants de ce continent durant l’époque de la conquête et de la colonisation ? Il faut reconnaître en toute sincérité les sévices commis, dus au manque d’amour de la part des personnes qui n’ont pas su voir dans les Autochtones des frères et fils du même Dieu le père.

Discours du pape Jean-Paul II célébrant le 500e anniversaire de la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, en République dominicaine

Source : le Vatican

En savoir plus
  • 63 %
    Proportion des Autochtones canadiens qui sont chrétiens
    SOURCE : STATistique CANada
    36 %
    Proportion des Autochtones canadiens qui sont catholiques
    SOURCE : STATistique CANada