Après une intervention policière qui s’est étirée pendant toute la fin de semaine, la police de Windsor, en Ontario, a mis fin dimanche à la manifestation qui bloquait depuis près d’une semaine le pont Ambassador. L’un des principaux liens frontaliers entre le Canada et les États-Unis a finalement été rouvert en toute fin de soirée, a annoncé la société exploitante de la structure

Dimanche matin, une poignée de manifestants restaient immobiles face au barrage policier, près du pont Ambassador à Windsor. Seuls les drapeaux de la feuille d’érable flottaient dans le froid mordant. Des « honte à vous », dirigés vers les policiers, brisaient le silence.

Cette poignée d’irréductibles opposants aux mesures sanitaires a finalement été repoussée et arrêtée lors d’une intervention policière qui a mis fin, dimanche, à près d’une semaine de blocus sur ce pont vital pour l’économie canadienne et américaine.

La cheffe de police de Windsor, Pamela Mizuno, a indiqué en fin d’après-midi que de 25 à 30 personnes ont été arrêtées. Cinq véhicules ont aussi été saisis samedi et sept autres ont été remorqués.

  • Les policiers ont procédé à l’arrestation d’un manifestant qui refusait de quitter les lieux.

    PHOTO NATHAN DENETTE, LA PRESSE CANADIENNE

    Les policiers ont procédé à l’arrestation d’un manifestant qui refusait de quitter les lieux.

  • Seuls les drapeaux de la feuille d’érable flottaient dans le froid mordant.

    PHOTO JEFF KOWALSKY, AGENCE FRANCE-PRESSE

    Seuls les drapeaux de la feuille d’érable flottaient dans le froid mordant.

  • Dimanche matin, une poignée de manifestants restaient immobiles face au barrage policier, près du pont Ambassador à Windsor.

    PHOTO NATHAN DENETTE, LA PRESSE CANADIENNE

    Dimanche matin, une poignée de manifestants restaient immobiles face au barrage policier, près du pont Ambassador à Windsor.

  • La police a remorqué cette camionnette appartenant à un manifestant.

    PHOTO NATHAN DENETTE, LA PRESSE CANADIENNE

    La police a remorqué cette camionnette appartenant à un manifestant.

  • Les policiers ont formé un rang pour faire reculer les manifestants.

    PHOTO NATHAN DENETTE, LA PRESSE CANADIENNE

    Les policiers ont formé un rang pour faire reculer les manifestants.

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Barrage policier

L’intervention policière a débuté tôt dimanche matin. Un peu avant 8 h, les agents ont formé une ligne devant la barricade de béton qu’ils avaient érigée samedi soir. Derrière eux se trouvaient des véhicules blindés et plusieurs autobus pour transporter les manifestants en cas d’arrestation. « Rentrez à la maison, sinon, nous allons vous arrêter », ont-ils crié à la vingtaine de protestataires qui avaient passé la nuit sur les lieux et qui scandaient « liberté ! »

Quelques-uns ont tourné les talons en ramassant des déchets et des bouteilles de propane au sol, mais certains n’ont pas bougé. Devant le refus d’obtempérer, les policiers ont avancé vers les manifestants, les forçant à reculer. Une dame, assise en tailleur et immobile, a été arrêtée.

Linden Debassige, un protestataire en ligne de front, a reculé en agitant un drapeau du Canada devant lui. « C’est la chose la plus importante que j’ai faite de ma vie », avait dit ce résidant de Toronto à La Presse, quelques minutes plus tôt, sourire aux lèvres. « Je vais rester jusqu’à ce que les policiers m’emmènent ! »

Pendant que les agents avançaient, une autre ligne formée de policiers est apparue au loin. Ils ont encerclé les quelques camionnettes toujours présentes au milieu de la rue. « Ouvrez la porte ! », ont-ils ordonné. Les journalistes ont alors dû quitter les lieux, à la demande des policiers.

Rappelons que vendredi, le premier ministre de l’Ontario avait décrété l’état d’urgence, avant qu’une injonction de la Cour supérieure de l’Ontario ordonne le départ des manifestants. En effet, l’industrie automobile des deux côtés de la frontière a été particulièrement perturbée par ce barrage, puisque plus de 25 % des marchandises exportées du Canada ou des États-Unis transitent par cette voie.

Les manifestants repoussés loin du pont

À quelque deux kilomètres du pont, une autre opération policière s’est déroulée à une importante intersection. Les agents ont dispersé les manifestants et demandé à ceux qui bloquaient un stationnement de déplacer leur voiture, à la demande du propriétaire du terrain. Certains ont refusé de coopérer, se tenant immobiles devant leur véhicule.

« C’est dégoûtant, a lancé Rene Brouillette, une passante qui regardait la scène de sa voiture. Les gens manifestaient pacifiquement. »

En après-midi, les manifestants se sont regroupés dans une artère commerciale adjacente. Face à l’avancée des policiers, le protestataire Adnan Ben faisait des aller-retour en agitant une pancarte fluo sur laquelle l’on pouvait lire « Est-ce le Canada communiste ? » Pour lui, la situation était « dégoûtante » et « surréelle ». « Je ne veux pas me faire arrêter, mais je suis ici pour rester, a-t-il lancé à La Presse. Je n’ai jamais vécu cela. »

De nouvelles arrestations, certaines musclées, ont été réalisées pendant l’opération qui a duré jusqu’en fin d’après-midi.

Les États-Unis réagissent

Washington a salué dimanche l’intervention policière canadienne en cours pour rouvrir plusieurs axes frontaliers stratégiques entre les États-Unis et le Canada, dont le pont Ambassador. Une conseillère de Joe Biden à la sécurité nationale, Liz Sherwood-Randall, a exprimé « sa reconnaissance pour les efforts résolus déployés par les forces de l’ordre [canadiennes] le long de la frontière pour parvenir à la levée complète des blocus ».

Le premier ministre ontarien Doug Ford a aussi remercié la police sur Twitter : « Je veux saluer et remercier [tous ceux] qui ont travaillé tout au long de la fin de semaine pour aboutir à une fin pacifique de ce blocage illégal du pont Ambassador », a-t-il gazouillé.

Samedi matin, de nombreuses voitures de police avaient fait reculer les manifestants, jusqu’à ce que l’intersection principale près du pont soit libérée. La foule ainsi que quelques camionnettes ont toutefois été sur place au courant de la journée, malgré le départ des poids lourds. Les opposants aux mesures sanitaires, dont certains accompagnés de leurs enfants, ont entonné à plusieurs reprises : « Ohé, ohé, ohé, Trudeau must go [doit partir] ».

Avec l’Agence France-Presse et La Presse Canadienne