Le rapport de l’autorité iranienne de l’aviation civile soulève plus de questions qu’il n’apporte de réponses. C’est la principale conclusion du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST), qui a exceptionnellement commenté les conclusions d’une agence étrangère jeudi.

L’agence canadienne s’attaque également à la crédibilité du rapport produit par une instance qui n’est pas indépendante du gouvernement iranien.

L’Organisation de l’aviation civile iranienne a rendu public mercredi son rapport définitif sur l’écrasement d’un avion de ligne ukrainienne abattu par deux missiles iraniens le 8 janvier 2020. Les 176 personnes à bord sont mortes dans l’écrasement, dont 55 citoyens canadiens, 30 résidents permanents et des dizaines d’autres passagers qui se rendaient au Canada, via Kiev.

Le rapport iranien a conclu qu’une erreur humaine était à l’origine des tirs de missiles dirigés sur l’avion civil. Mais pour le BST, le rapport ne fait que rapporter ce qui s’est passé, sans donner d’explications sur la chaîne d’évènements qui ont conduit à la tragédie.

Rappelons que le drame est survenu dans un contexte de tension accrue entre l’Iran et les États-Unis, après que l’ancien président Trump eut ordonné, cinq jours plus tôt, une frappe aérienne pour exécuter un important général iranien, qui se trouvait près de l’aéroport de Bagdad, en Irak.

En guise de représailles, l’Iran venait d’ailleurs de lancer des missiles sur deux bases militaires américaines situées en Irak.

Le BST juge que le rapport des autorités iraniennes comporte des lacunes importantes et ne répond pas à trois questions essentielles. Quelle est la séquence exacte des évènements qui ont conduit à des tirs de missiles sur un avion civil ? Sur quelle base l’Iran a-t-il décidé de garder ouvert son espace aérien, dans un contexte d’escalade militaire et finalement, pourquoi des avions civils étaient-ils autorisés à voler dans l’espace aérien iranien ?

« L’Iran n’a émis aucun avertissement sur la situation de crise [qui avait cours], a rappelé Natacha Van Themsche, directrice des enquêtes au BST. Huit avions ont décollé de l’aéroport de Téhéran [avant le vol 752] et d’autres ont décollé après. »

« C’est important de regarder ce qui peut être corrigé pour éviter qu’une telle situation se reproduise. La meilleure façon que ça n’arrive pas à nouveau, c’est de tirer des leçons de ce qui s’est passé », a ajouté Mme Van Themsche.

Le rapport fait état d’une série d’erreurs qui ont conduit au lancement des deux missiles. Tout d’abord, une lecture incorrecte de la trajectoire de l’avion, en raison d’une erreur humaine, a conduit un opérateur militaire à croire que le vol 752 se dirigeait vers Téhéran, à basse altitude, alors qu’il s’en éloignait plutôt, venant de prendre son envol.

L’opérateur a tenté d’alerter son centre de commandement, mais le message n’a jamais été relayé. « Sans avoir reçu le feu vert ou de réponse du centre de commandement, l’opérateur a estimé que la cible était effectivement hostile et il a tiré sur l’avion, à l’encontre de la procédure prévue », a conclu le rapport.