(Ottawa) La plus récente initiative de contrôle des armes à feu du gouvernement Trudeau a été accueillie par une pluie de critiques. Même la section du projet de loi présentée comme un effort pour protéger les victimes de violence familiale ne trouve pas grâce aux yeux de ceux qui militent pour le contrôle des armes à feu.

« La loi du drapeau rouge », dans le projet de loi C-21, est dénoncée par les représentants d’un groupe de médecins et les militants de Polysesouvient.

C-21, par cette « loi du drapeau rouge », permet à quiconque qui s’inquiète de l’état mental d’un propriétaire d’armes à feu de s’adresser à un juge pour faire saisir des armes.

« On va […] proposer des lois qui permettront aux amis et aux proches qui s’inquiètent d’une situation de demander à la cour de confisquer immédiatement les armes à feu des individus violents et à risque, et de suspendre leur permis d’acquisition », disait le premier ministre Justin Trudeau mardi.

En ce moment, c’est une plainte à la police qui peut conduire à la saisie des armes d’un individu qui n’a commis aucun crime.

« Ils mettent le fardeau sur les victimes potentielles. Imaginez une femme qui est battue, qui est dans une maison d’hébergement… Elle ? Elle doit aller en cour convaincre un juge pour enlever les armes de son ex ? Au lieu de maintenant juste appeler la police », s’est indignéeHeidi Rathjen, porte-parole de Polysesouvient, en entrevue téléphonique, mercredi.

Selon Mme Rathjen, rien dans C-21 n’élargit les critères pour faciliter la saisie d’armes, celle-ci demeurant discrétionnaire.

« Ça ne change pas les critères. Ça fait juste ajouter un processus », a-t-elle souligné.

De son côté, l’Association canadienne des médecins d’urgence (ACMU) rappelle qu’elle réclame depuis 25 ans une loi qui rende obligatoire la signalisation d’un individu armé à risque, signalisation qui conduirait automatiquement à la saisie temporaire des armes jusqu’à ce que la crise, qu’elle soit de santé mentale ou de toute autre nature, soit passée.

Le projet de loi C-21, selon l’ACMU, ne fait rien de tel.

« Plutôt qu’une loi du drapeau rouge, le gouvernement fédéral a levé le drapeau blanc de la capitulation », s’est désolée l’ACMU dans un communiqué publié mardi.

Le ministre de la Sécurité publique, Bill Blair, n’en démord pas : sa loi du drapeau rouge sera utile.

« Cela donne le pouvoir au public, et la responsabilité n’est pas transférée à qui que ce soit », assure-t-il dans une déclaration fournie par courriel, mercredi après-midi.

« Nous ne tentons d’aucune façon de retirer cette responsabilité de la police. Nous faisons entrer davantage de personnes dans un cercle d’intervention […] pour désamorcer une situation dangereuse », a-t-il avancé.

Mme Rathjen cite quantité de tragédies où ni les proches ni les médecins ne sont intervenus à temps pour retirer les armes à feu.

« On veut des mesures concrètes », a-t-elle insisté, en réclamant un élargissement des circonstances où la saisie des armes devient « obligatoire » et « rapide ».

Aux États-Unis, a-t-elle fait remarquer, un ex-conjoint qui fait l’objet d’une ordonnance de protection n’a pas le droit d’avoir des armes à feu. Une telle interdiction automatique n’existe pas au Canada.