(Toronto) Les défenseurs de la communauté tigréenne au Canada demandent à Ottawa d’ouvrir son ambassade à Addis-Abeba à leurs proches qui demandent protection, au milieu d’un conflit qui s’intensifie et qui aurait fait des milliers de morts.

Azeb Gebrehiwot, de l’Association des communautés tigréennes au Canada, croit que le gouvernement canadien devrait fournir une protection temporaire aux membres de sa communauté en Éthiopie et dénoncer sans équivoque la violence qui y règne.

Mme Gebrehiwot, qui a immigré au Canada il y a 18 ans, soutient qu’elle n’a pas pu entrer en contact avec ses proches là-bas en raison d’une coupure totale des communications dans la région du Tigré. Par contre, elle a pu contacter certains de ses cousins dans la capitale, qui craignent d’être arrêtés et tués.

« Je sais qu’ils meurent de faim. Il n’y a pas de nourriture. Les hôpitaux sont complètement détruits et je suis extrêmement inquiète », a-t-elle déclaré en entrevue. « Je ne peux même pas dormir, je ne peux pas fermer l’œil de la nuit. Tous les jours, je regarde les nouvelles en me levant », a-t-elle confié.

Elle a déclaré que plus de 500 membres de la communauté tigréenne en Ontario et au Québec se sont réunis jeudi et vendredi derniers sur la colline du Parlement à Ottawa pour honorer les victimes de ce conflit. Les États-Unis ont parlé de nettoyage ethnique dans certaines parties du Tigré.

« Notre peuple dans l’ouest du Tigré subit effectivement un nettoyage ethnique, a soutenu Mme Gebrehiwot. Les corps sont jetés (dans) une rivière. » Le gouvernement éthiopien a rejeté ces allégations et affirmé qu’il aidait le Tigré à se reconstruire.

Le conflit qui a commencé il y a un an entre les troupes gouvernementales et les partisans du Front de libération du peuple du Tigré a conduit à la pire crise humanitaire au monde depuis une décennie, avec plus de 350 000 personnes menacées de famine, selon les Nations unies et d’autres organisations non gouvernementales.

Selon l’ONU, quelque 5,2 millions de personnes ont besoin d’aide dans les régions éthiopiennes du Tigré, d’Amhara et d’Afar, des milliers de personnes seraient tuées et plus de deux millions auraient été contraintes de fuir leur foyer.

Affaires mondiales Canada a publié dimanche une déclaration appelant à la « fin immédiate des hostilités » et condamnant « fermement les attaques sans discrimination contre les civils et le personnel humanitaire dans le nord de l’Éthiopie ». Affaires mondiales a aussi annoncé le retrait des membres des familles des employés canadiens de l’ambassade ainsi que tous les employés canadiens non essentiels, tout en exhortant les gens à partir, s’ils peuvent le faire en toute sécurité.

« Le Canada soutient tous les habitants de l’Éthiopie […] Les violations et abus documentés des droits de l’homme et les violations du droit humanitaire international sont profondément troublants. »

La ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, a déclaré lundi à Ottawa qu’elle était préoccupée par les violations des droits de la personne en Éthiopie et elle appelait à un cessez-le-feu. Elle a déclaré que le Canada avait travaillé avec les Nations unies et la Commission éthiopienne des droits de la personne pour produire un rapport sur les violations qui se sont produites depuis le début des combats il y a un an.

Le directeur du Centre canadien pour les victimes de torture, à Toronto, estime qu’Ottawa devrait demander une enquête indépendante et impartiale et faire pression sur le gouvernement éthiopien pour qu’il mette fin au siège de la région du Tigré afin de permettre à l’aide humanitaire d’entrer dans la région. « Le silence ne devrait pas être la position canadienne », a-t-il déclaré.