(Ottawa) Le gouvernement canadien a discrètement modifié les critères sur son site Web pour un programme spécial pour les réfugiés afghans vulnérables afin que seuls ceux qui ont déjà réussi à s’échapper vers d’autres pays soient éligibles.

Les critères en ligne du « programme humanitaire spécial » incluaient auparavant les Afghans « qui se trouvent en Afghanistan ou à l’extérieur de l’Afghanistan », mais ils ont été modifiés ce mois-ci pour ne s’appliquer qu’à ceux « en dehors de l’Afghanistan ».

Le programme est l’un des deux mis en place pour aider à faire venir 40 000 réfugiés afghans au Canada et est destiné aux groupes vulnérables, notamment les femmes leaders, les minorités religieuses ou ethniques persécutées, les personnes LGBTQ et les journalistes.

Les critères en ligne de l’autre programme, qui s’adresse aux interprètes et autres personnes qui ont aidé le Canada au cours de sa mission militaire ainsi qu’au personnel de l’ambassade, semblent toujours permettre à ceux qui se trouvent en Afghanistan de postuler.

Lorsque le gouvernement a annoncé pour la première fois le programme humanitaire spécial en août, il a déclaré qu’il s’appliquerait à ceux qui se trouvaient en dehors de l’Afghanistan, mais il a finalement inclus ceux coincés à l’intérieur du pays déchiré par la guerre dans ses critères en ligne.

Le gouvernement a déclaré lundi que la modification du site Web était une « communication plutôt qu’un changement de politique ».

Alex Cohen, porte-parole du ministre de l’Immigration Marco Mendicino, a déclaré que le Canada continuerait de faire tout son possible pour aider les Afghans vulnérables à l’intérieur et à l’extérieur du pays.

Il a déclaré que le gouvernement « adapte nos programmes à l’évolution de la situation en Afghanistan et a ajouté une disposition permettant à deux nouvelles organisations partenaires de référer des cas exceptionnels d’individus qui se trouvent à l’intérieur de l’Afghanistan »

« Nous examinons régulièrement les communications publiques d’Immigration Réfugiés et Citoyenneté Canada pour nous assurer qu’elles reflètent nos politiques et fournissent les meilleures informations possibles aux candidats, et les mettons à jour en conséquence », a-t-il déclaré.

« La modification de notre site Web était un changement de communication, qui ne reflétait pas un changement de politique. »

Le Canada a mis fin à sa mission de transport aérien depuis Kaboul vers la fin août alors que les États-Unis achevaient leur propre retrait du pays. Des milliers de personnes autorisées à voyager au Canada ont été laissées pour compte, y compris des citoyens canadiens.

Des groupes travaillant avec des Afghans qui tentent de fuir le pays ont déclaré que la modification des critères du programme humanitaire sur le site Web officiel du Canada sèmerait la confusion et le désespoir parmi les Afghans qui espèrent venir au Canada.

Le site Web est la source d’informations faisant autorité pour les personnes éligibles et écrire que seuls ceux qui se trouvent à l’extérieur du pays sont désormais éligibles, pourrait conduire des Afghans à recourir aux passeurs, ont-ils averti.

Stephen Watt de Northern Lights Canada, une organisation pour les réfugiés, a déclaré que le plan du gouvernement visant à faire venir 40 000 Afghans au Canada était enveloppé de secret depuis son annonce.

« Il n’y a toujours pas de moyen clair de postuler au programme, ou de découvrir qui il accepte ou comment il fonctionne », a-t-il déclaré. « C’est une question de vie ou de mort pour de nombreuses personnes à qui nous parlons en Afghanistan. »

« Notre gouvernement doit dévoiler ses plans pour ces personnes très vulnérables qu’il a promis d’aider avant les élections, et fournir une voie claire pour cette aide. Ce n’est pas le moment de faire des promesses creuses et des processus secrets. »

Wendy Noury Long, directrice de l’association des interprètes afghans, a déclaré qu’elle craignait que le changement, effectué à la mi-octobre, ne pousse des Afghans désespérés à faire des efforts extrêmes pour quitter le pays afin de se qualifier.

« Les gens vont se demander comment puis-je sortir ? Est-ce que je contacte des passeurs ? Des pays renvoient activement des personnes vers l’Afghanistan », a-t-elle déclaré.

« Il s’agit d’un changement de politique. C’est l’explication de votre admissibilité. Vous prenez un risque énorme en essayant de vous rendre dans un autre pays et vous pourriez vous retrouver expulsé vers l’Afghanistan. »

Ceux qui remplissent les critères doivent s’inscrire pour obtenir le statut de réfugié auprès de l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés ou du gouvernement où ils vivent et attendre d’être référés dans le cadre du programme. Ils peuvent également être identifiés comme éligibles par un parrain privé.

Environ 3700 Canadiens et réfugiés afghans, dont d’anciens interprètes, ont été transportés par avion par le Canada avant la fin août.

Environ 1700 interprètes et autres Afghans ayant des papiers pour venir au Canada sont actuellement dans des refuges à Kaboul. Certains refuges, gérés par une ONG et financés par d’anciens combattants et des dons privés, risquent de fermer en quelques semaines en raison du manque de financement.

Le ministre de la Défense Harjit Sajjan a annoncé vendredi que le Canada réinstallerait jusqu’à 322 Afghans de plus qui ont aidé les pays de l’OTAN.