(Ottawa) Une nouvelle analyse du bassin de logements abordables au pays laisse entendre que la stratégie des libéraux pour en fournir davantage est confrontée à des besoins plus criants qu’on le pensait.

L’approche pourrait aussi accuser encore plus de retard, au sortir de la pandémie.

Pour les gouvernements, la crise de santé publique pourrait être une occasion d’acheter des logements locatifs à moindre coût.

Le chercheur Steve Pomeroy, de l’Université Carleton, conseille des groupes défendant le droit des locataires et des gouvernements. De 2011 à 2016, il a constaté une baisse de 322 600 unités locatives abordables sur le marché privé.

Au cours de la même période, les investissements fédéraux et provinciaux dans le logement abordable ont créé environ 20 000 unités, ce qui signifie que pour chaque nouveau logement créé par les gouvernements, 15 ont été perdus.

La stratégie nationale des libéraux en matière de logement, visant à créer 150 000 logements abordables en 10 ans, ne permettrait que de remplacer environ la moitié de ceux qui ont été perdus.

On craint un ressac après la crise économique causée par la pandémie, car les problèmes des locataires à payer les loyers mettent de la pression sur les petits propriétaires ; leurs actifs sont parfois récupérés par de grands fonds immobiliers, qui ont peu d’intérêt à les garder abordables.

C’est pourquoi le gouvernement fédéral envisage d’acheter ces actifs.

« Si les (fiducies de placement immobilier) viennent et achètent ces propriétés, pourquoi ne laissons-nous pas les organismes sans but lucratif faire la même chose », demande M. Pomeroy, chercheur principal au Centre de recherche et d’éducation urbaines, à Carleton.

Ces derniers jours, le ministre du Développement social, Ahmed Hussen, a laissé entendre qu’il était disposé à mousser l’idée avec des fonds fédéraux.

« Si c’est l’occasion de vraiment freiner l’itinérance, nous devrions saisir l’occasion », a dit Jeff Morrison, directeur général de l’Association canadienne d’habitation et de rénovation urbaine.

Il n’y a pas de programme spécifique dans la stratégie nationale pour permettre des acquisitions, a mentionné M. Pomeroy.

Tim Richter, président de l’Alliance canadienne pour mettre fin à l’itinérance, a déclaré aux Communes qu’il y a une réelle inquiétude que la crise économique accélère la baisse du nombre de logements abordables.

« Si nous sommes dans un trou, nous devons arrêter de creuser », a expliqué M. Richter.

Selon M. Pomeroy, un objectif réaliste pour le fédéral serait d’acheter environ 7500 unités par an. Cela coûterait plus d’un milliard de dollars en capitaux propres, prêts et subventions pour acheter et remettre à neuf des unités.

Ces unités pourraient être des appartements à prix modique ou des centres commerciaux et des bureaux pouvant être convertis, a dit Leilani Farha, qui dirige The Shift, un groupe de défense des droits des locataires.

« Ce pourrait être une opportunité formidable pour tous les paliers de gouvernements de penser à acheter ces actifs, pour que le public ait un plus grand accès à ceux-ci », a-t-elle dit.