(Vancouver) Le gouvernement de la Colombie-Britannique et les chefs héréditaires de Wet’suwet’en, qui ne s’entendent pas sur le gazoduc Coastal GasLink, tentent depuis un an de négocier l’autonomie gouvernementale de cette Première Nation.

Dans un communiqué de presse commun publié le 7 février 2019, les deux parties annonçaient un « processus de réconciliation », après « des décennies de négation des droits et titres de propriété de (la nation) Wet’suwet’en ».

« Les deux parties estiment que le moment est venu d’engager des discussions significatives, de nation à nation, afin que la Colombie-Britannique affirme les droits et les titres de propriété de (la nation) Wet’suwet’en », indiquait-on il y a un an.

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« La réconciliation est morte », peut-on lire sur cette pancarte brandie par un manifestation solidaire avec les Wet'suwet'en de la Colombie-Britannique, à Ottawa

L’ex-député néo-démocrate Murray Rankin, avocat et médiateur, a été nommé négociateur de la Colombie-Britannique quelques semaines seulement après que la Gendarmerie royale du Canada (GRC) a fait exécuter une première injonction contre les opposants au gazoduc Coastal GasLink, qui faisaient déjà obstruction il y a un an près de Houston, en Colombie-Britannique. Les pourparlers sur les titres de propriété ont commencé en mars dernier, après ces premières manifestations, en présence du premier ministre John Horgan.

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L’ex-député néo-démocrate Murray Rankin

Les promoteurs du projet Coastal GasLink soutiennent qu’ils ont conclu des ententes avec les 20 conseils de bande élus des Premières Nations riveraines de l’oléoduc projeté de 670 kilomètres, mais les chefs héréditaires de la nation Wet’suwet’en affirment être les propriétaires d’une grande partie du territoire, qu’ils n’ont jamais cédé à la Couronne par traité. Bien que les pourparlers sur l’autonomie gouvernementale soient indépendants de tout projet particulier d’infrastructure, ils prennent une nouvelle signification aujourd’hui.

Na’moks, l’un des cinq chefs de clan héréditaires, a ainsi déclaré que les pourparlers amorcés l’an dernier pourraient résoudre l’impasse sur ce gazoduc — une reconnaissance des droits de propriété de Wet’suwet’en affirmerait selon lui que Coastal GasLink doit quitter le territoire. Mais les implications des négociations en cours vont bien au-delà de cet enjeu particulier, a-t-il dit.

« Cela donnera de la certitude aux entreprises, cela améliorera les lois environnementales, et nos droits autochtones, qui sont inscrits dans la Constitution, seront normalisés. Nous n’aurons pas à aller constamment en cour », a indiqué en entrevue Na’moks, aussi appelé John Ridsdale.

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Na'moks

Deux gouvernances

Par ailleurs, les pourparlers en cours ne sont pas spécifiquement « transactionnels », a-t-il tenu à préciser. En d’autres termes, il ne faut pas s’attendre à ce que les chefs consentissent au gazoduc en échange d’une reconnaissance plus large des droits autochtones.

Les chefs de clan héréditaires Wet’suwet’en revendiquent des droits exclusifs sur plus de 22 000 kilomètres carrés dans le nord de la Colombie-Britannique. La Cour suprême du Canada a décrété en 1997 que la propriété autochtone n’avait pas été abolie par le gouvernement provincial — et qu’elle ne pouvait pas l’être, du reste. Mais le plus haut tribunal du pays n’a pas déterminé la zone et les limites spécifiques de ce territoire Wet’suwet’en.

Le ministre des Relations avec les Autochtones de la Colombie-Britannique, Scott Fraser, a convenu que bien que les discussions sur l’autonomie gouvernementale ne portent pas sur le gazoduc, elles demeurent pertinentes. Le ministre précise que son gouvernement ne cherche pas à imposer une quelconque forme de gouvernance à la Première Nation : il appartient aux Wet’suwet’en de déterminer les rôles que pourraient jouer les chefs héréditaires et les dirigeants élus d’un conseil de bande.

Bien que la Loi sur les Indiens ait désigné des conseils de bande élus comme les dirigeants reconnus au sein des Premières Nations, l’adoption par la Colombie-Britannique de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, l’automne dernier, a donné au gouvernement plus d’outils pour reconnaître les formes traditionnelles de gouvernance, comme celle des chefs héréditaires, a déclaré le ministre Fraser.

Mais tout comme Na’moks s’oppose mordicus au gazoduc de LNG Canada, le ministre Fraser maintient l’appui de son gouvernement au projet « approuvé il y a des années » à la suite d’une évaluation environnementale et de vastes consultations.