(Toronto) Des détenus toxicomanes soutiennent en cour que le fait de les empêcher d’avoir accès à des seringues stériles en prison contrevient à leurs droits constitutionnels puisqu’il s’agit de soins de santé essentiels.

Lors de l’audience en Cour supérieure de l’Ontario, vendredi à Toronto, leurs avocats ont plaidé que le nouveau programme d’échange de seringues qui se déploie dans les établissements carcéraux ne répond pas aux besoins.

La poursuite est menée par un ex-détenu, le Réseau juridique canadien VIH/sida et trois autres organisations. Ceux-ci demandent au tribunal de déclarer que les détenus ont droit à un programme de distribution de seringues stériles simple, confidentiel et efficace.

« Un accès raisonnable à du matériel d’injection stérile est une mesure de prévention essentielle, a déclaré l’avocate Lori Stoltz au juge Edward Belobaba. Il s’agit d’une question de santé publique. »

Les demandeurs insistent sur le fait que le programme doit être géré de manière indépendante du personnel chargé de la surveillance des détenus. S’ils sont forcés de s’adresser aux agents correctionnels pour obtenir des seringues, les détenus vont éviter de le faire afin de ne pas être punis, de perdre des privilèges ou de faire l’objet d’une surveillance accrue.

Les enjeux de sécurité ne devraient pas interférer dans ce qui constitue une affaire de santé confidentielle.

Le gouvernement soutient de son côté que les seringues représentent une menace pour la sécurité des agents correctionnels et les autres détenus qui pourraient être piqués de manière accidentelle.

« Nous avons des preuves de ce danger », a déclaré au tribunal l’avocate du gouvernement Kathryn Hucal.

Selon elle, le programme actuel permet d’assurer la sécurité du personnel tout en offrant un niveau de confidentialité suffisant pour les détenus. Il n’y aurait aucun effet dissuasif empêchant les détenus de se prévaloir du programme d’après Me Hucal.

Service correctionnel Canada aurait mis en place un programme d’échange de seringues dans neuf des 43 pénitenciers fédéraux jusqu’ici. D’après les données disponibles, environ 42 % des demandes déposées par des détenus qui réclament l’accès à des seringues stériles sont refusées. Ces personnes doivent donc se débrouiller sans seringues propres.

Steve Simons, un ex-détenu libéré il y a neuf ans, considère que ce service est essentiel afin d’éviter la propagation d’infections comme l’hépatite ou le VIH dans les pénitenciers et dans la population générale une fois que les gens sont libérés.

« J’ai contracté l’hépatite C parce qu’il n’y avait pas de matériel stérile disponible », a-t-il confié à sa sortie du tribunal.

L’homme de 50 ans confirme que les détenus craignent de s’adresser aux agents correctionnels pour obtenir des seringues parce que ces informations se retrouvent dans leur dossier et que cela nuit à leurs chances d’obtenir une libération conditionnelle.