(Ottawa) Le secrétaire général de l’OTAN a laissé entendre, lundi, que la mission de formation militaire dirigée par le Canada en Irak n’est pas sur le point de prendre fin définitivement.

Les commentaires de Jens Stoltenberg font suite à la suspension, en fin de semaine, des activités de la mission canadienne, en raison de problèmes de sécurité au lendemain de l’élimination par les États-Unis d’un haut commandant militaire iranien en Irak.

« Nous avons suspendu notre mission de formation en raison de la situation sécuritaire sur le terrain, mais nous sommes prêts à reprendre la formation lorsque la situation le permettra », a déclaré M. Stoltenberg à l’issue d’une rencontre à Bruxelles avec les ambassadeurs des 29 pays membres de l’Alliance atlantique, dont le Canada. M. Stoltenberg a souligné que cette mission de formation était essentielle pour continuer la lutte contre le groupe armé État islamique (Daech).

La mission de formation comprend environ 250 soldats canadiens ; le Canada compte également des dizaines de militaires des forces spéciales et d’autres unités en Irak, dont les activités ont également été suspendues par crainte de représailles à la suite du meurtre du général iranien Qassem Soleimani par un drone américain près de l’aéroport de Bagdad.

Le général Soleimani était commandant de l’unité d’élite iranienne Al-Qods, des Gardiens de la révolution en Iran. Il était largement considéré comme le deuxième leader le plus puissant d’Iran, après l’ayatollah Ali Khamenei, et avait aussi une influence significative en Irak et ailleurs au Moyen-Orient.

À la suite du meurtre du général Soleimani, le premier ministre intérimaire d’Irak et le Parlement ont demandé à toutes les troupes américaines et étrangères de quitter le pays, alors que l’on craint que l’Iran ou ses mandataires dans la région ne commettent des attentats contre les forces occidentales.

Des ministres canadiens

Éludant les questions sur ces appels de Bagdad, M. Stoltenberg a noté que l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) était en Irak sur invitation des autorités irakiennes. « Nous continuerons à travailler en étroite collaboration pour avoir un dialogue étroit avec le gouvernement irakien », a-t-il simplement indiqué.

Le gouvernement canadien n’a apporté aucune précision sur l’état de la mission militaire, dans une déclaration qui évoque un entretien, lundi, entre le ministre des Affaires étrangères, François-Philippe Champagne, et son homologue irakien, Mohammed Ali al-Hakim. M. Champagne a réitéré le soutien du Canada à la lutte contre Daech, selon le communiqué, même si les deux ministres ont convenu que la désescalade était nécessaire pour assurer la sécurité et la stabilité à long terme de l’Irak.

Le ministre canadien de la Défense, Harjit Sajjan, a également fourni peu de détails sur une conversation qu’il a eue lundi avec le secrétaire Stoltenberg au sujet de la mission de formation de l’OTAN. Sur Twitter, il a indiqué que la suspension de la mission était « temporaire » et le Canada reprendrait la formation militaire quand la situation le permettrait.

Le bureau du premier ministre a indiqué que Justin Trudeau avait discuté avec M. Stoltenberg de la situation en Irak.

« Ils ont souligné l’importance de la désescalade des tensions et la nécessité de soutenir la sécurité et la stabilité en Irak et dans la région, notamment par les efforts en cours contre Daech », indique une transcription de la conversation, qui ajoute que M. Stoltenberg a noté que l’OTAN était prête à poursuivre la formation « lorsque la situation le permettra ».

Une commandante

Le Canada dirige la mission de formation de l’OTAN en Irak depuis sa création en 2018 ; c’est une Québécoise, la majore-générale Jennie Carignan, qui en a pris récemment le commandement. La mission a été créée pour former les militaires irakiens afin qu’ils puissent mieux se défendre contre toute résurgence de Daech en Irak.

PHOTO OLIVIER PONTBRIAND, ARCHIVES LA PRESSE

La majore-générale Jennie Carignan

La mission de l’OTAN est distincte de celle de dizaines de soldats des forces spéciales canadiennes qui travaillent avec les forces de sécurité locales dans la région du Kurdistan, dans le nord de l’Irak, depuis octobre 2014. Le Canada dispose aussi de personnel médical et d’une unité d’hélicoptères dans le nord. Toutes ces activités ont également été suspendues pendant que le gouvernement canadien évalue la situation dans la région.

Non seulement tous les membres de l’OTAN ont exprimé leur soutien à la mission de formation lors de la réunion des ambassadeurs de lundi, a déclaré M. Stoltenberg, mais les responsables irakiens eux-mêmes avaient souligné son importance lors de sa visite dans le pays à l’automne.

« L’une des meilleures armes dont nous disposons dans la lutte contre le terrorisme international est de former des forces locales, de renforcer les capacités locales, et c’est exactement ce que fait la coalition et ce que fait l’OTAN grâce à notre mission de formation en Irak », a-t-il déclaré.

Le Canada a déployé ses premières troupes pour combattre Daech en 2014, lorsque le groupe extrémiste a envahi une grande partie de la Syrie et de l’Irak. La mission a évolué à plusieurs reprises depuis : si elle visait d’abord à repousser le groupe armé État islamique, elle vise aujourd’hui à s’assurer que Daech n’a pas la capacité de renaître.