(Ottawa) La Chine utilise les détentions arbitraires comme un moyen d’atteindre ses objectifs politiques internationaux et nationaux, a déclaré jeudi le premier ministre Justin Trudeau.

M. Trudeau affirme qu’il s’agit d’une tactique qui inquiète non seulement le Canada, mais également ses alliés occidentaux.

Le premier ministre a tenu ces propos lors d’une réunion avec le comité de rédaction du Toronto Star, où il a été invité à répondre aux dernières accusations à l’endroit du Canada lancées par le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.

Questionné plus tôt jeudi sur la nomination par M. Trudeau du consultant en affaires Dominic Barton en tant que nouvel ambassadeur du Canada en Chine, le porte-parole du gouvernement chinois, Geng Shuang, a déclaré que le Canada devait réfléchir à ses « erreurs » et libérer immédiatement Meng Wanzhou, la dirigeante de Huawei arrêtée en Colombie-Britannique en décembre en vertu d’une demande d’extradition américaine.

« Nous attendons avec impatience ses efforts positifs pour aider à mettre les relations sino-canadiennes sur la bonne voie », a déclaré M. Geng dans des remarques traduites publiées sur le site internet de son ministère.

« Dernièrement, les relations sino-canadiennes ont fait face à de sérieuses difficultés. La responsabilité incombe entièrement à la partie canadienne, et le Canada en connaît clairement la cause. Nous exhortons la partie canadienne à réfléchir à ses actes répréhensibles, à prendre au sérieux la position et les préoccupations de la Chine, à libérer immédiatement Meng Wanzhou et à assurer son retour en Chine en toute sécurité », a-t-il ajouté.

La Chine a emprisonné deux Canadiens, l’ex-diplomate Michael Kovrig et l’entrepreneur Michael Spavor, en vertu de soupçons d’espionnage dans le cadre de ce qui est largement considéré comme une mesure de représailles après l’arrestation de Mme Meng.

« Ce comportement n’est pas acceptable »

« Le recours à la détention arbitraire comme un moyen d’atteindre des objectifs politiques, internationaux ou nationaux, préoccupe non seulement le Canada, mais également tous nos alliés, qui ont souligné que ce comportement n’est pas acceptable dans la communauté internationale et ont dit craindre que la Chine n’exerce avec eux le même genre de tactiques », a déclaré M. Trudeau jeudi à la fin d’une rencontre avec les journalistes du Toronto Star, qui a été diffusée en direct.

Le premier ministre a affirmé qu’il ne voulait pas aggraver les tensions avec la Chine, et a souligné que Pékin avait rapidement approuvé la demande du Canada de nommer M. Barton comme ambassadeur.

M. Trudeau et ses ministres ont souvent qualifié d’arbitraire la détention de MM. Kovrig et Spavor et ont mobilisé un large soutien international de plusieurs dizaines de pays, dont les États-Unis. Cette coalition a provoqué la colère de la Chine, qui a interdit les importations de canola canadien et bloqué l’accès à d’autres produits agricoles.

M. Trudeau a déclaré que le Canada n’avait d’autre choix que de s’engager économiquement avec la Chine, étant donné qu’elle constitue la deuxième économie du monde, mais a ajouté qu’il fallait être « lucide » dans les relations avec Pékin.

« La Chine respecte un ensemble de règles et de principes très différent de celui que nous avons en Occident. Et il sera très important de pouvoir exposer nos arguments clairement, avec force et de manière constructive », a affirmé le premier ministre.

« Nous sommes très investis dans les enjeux pour les Canadiens, dans les questions du canola et du bœuf et du porc, mais nous nous sommes engagés de manière concrète pour faire comprendre au gouvernement chinois que son comportement nous préoccupe », a-t-il ajouté.

« Nous sommes très préoccupés par les 300 000 Canadiens de Hong Kong à l’heure actuelle, mais nous allons essayer d’être constructifs de manière à ce que cela soit bon pour les Canadiens et, finalement, bon pour la population chinoise. »