Le retour à la maison se poursuit à Fort McMurray, en Alberta. Si certains retrouvent une maison calcinée, d'autres, comme Claudine Doiron, ont eu plus de chance et leur résidence est toujours debout. Mais la ville lui paraît maintenant irréelle et elle s'inquiète encore du feu alors que d'autres incendies ont ravagé des édifices ces derniers jours.

Avant de pouvoir rentrer chez elle, Mme Doiron disait ressentir un certain soulagement, et d'avoir hâte de constater ce qui avait été brûlé - ou pas.

Sur le chemin du retour, l'autoroute 63, sur laquelle on avait vu une file interminable de voitures encerclées par les flammes le 3 mai dernier, il ne restait plus de débris ni de voitures abandonnées, juste la forêt brûlée, a constaté la dame originaire du Nouveau-Brunswick, qui a habité au Québec pendant 10 ans, à Cowansville.

Et la ville elle-même lui semble un peu irréelle.

«Ça nous donne des frissons, rapporte-t-elle depuis Fort McMurray. On vient de perdre gros. Ça a l'air d'un rêve.»

Pour elle, il est difficile de comprendre comment le feu s'est propagé de façon si violente.

Le centre-ville a été peu touché, indique-t-elle. Certains quartiers, comme le sien, ont été épargnés en grande partie. Son condominium est intact, sauf pour la fumée qui a laissé une odeur persistante. Et l'eau contaminée qui doit être bouillie.

«Pour moi, ce n'est pas si pire», dit-elle, ajoutant qu'elle a beaucoup de compassion pour ceux qui ont tout perdu. «C'est triste à voir.»

Elle est aussi sans nouvelles d'une amie dont la maison a été rasée par les flammes.

Et surtout, elle refuse de se laisser abattre.

«Il faut rester positif, sinon il y en a qui vont faire des dépressions», dit-elle.

D'autres quartiers ont été réduits en cendres, comme celui près de l'aéroport, où il ne reste que trois maisons, relate Mme Doiron.

Les résidants des quartiers qui ont été les plus touchés n'ont pu s'y rendre qu'à compter de ce mercredi, et encore, ils doivent être accompagnés par une équipe de réponse aux catastrophes. Ceux dont les maisons sont encore debout peuvent aller récupérer des biens, mais ne peuvent y demeurer, car les cendres toxiques posent un danger pour leur santé.

Une fuite difficile

Le retour a été moins stressant que la fuite pour Mme Doiron.

Elle a mis deux heures et demie pour rentrer chez elle rejoindre son mari - un trajet de huit minutes normalement depuis son travail. La route 63 était déjà engorgée. Ils ont attendu un ami du couple, coincé dans son usine un peu plus au nord de la ville, qui ne pouvait rentrer en voiture, puisque la route en direction sud avait été bloquée. Il a fait le trajet de trois heures à pied pour rejoindre sa femme, dit-elle, et est arrivé les pieds couverts d'ampoules.

«Beaucoup de familles ont été séparées comme cela, cela ajoute au stress», dit-elle.

Ils se sont entassés à cinq dans une voiture, car ils n'avaient pas assez d'essence pour prendre chacun leur véhicule. Elle n'a donc pu emporter qu'une des cinq valises qu'elle avait préparées. Par malheur, c'était celle qui contenait les habits de travail de son mari - et cinq bouteilles de vin. Oubliées les photos et les souvenirs de famille, relate-t-elle maintenant en riant.

Ils ont ajouté leur voiture à la longue file de celles qui tentaient d'évacuer la ville, entourée par les flammes. Plus de 11 heures de route, pour un trajet qui n'en prend que quatre et demie.

«Il y avait des gens qui passaient quasiment dans le feu. On était tous sur un stress, tout ce qu'on voulait c'était sortir de la ville, il y avait du feu tout le tour», dit-elle.

Et le stress ne s'est pas encore évanoui.

«On est comme inquiet de temps en temps. Avant-hier, il y a un gros bloc qui a brûlé, aussi une maison, puis ils disent qu'il y a des fuites de gaz», explique Claudine Doiron.

«On dirait qu'on est un peu insécures par rapport à ça. On se dit: ça va-tu brûler chez nous?»

La GRC affirme toutefois que cet incendie n'est pas relié aux feux de forêt qui ont ravagé des secteurs de la ville le mois dernier et forcé l'évacuation de ses 80 000 habitants.

Malgré tout, Claudine Doiron est allée au travail mercredi matin.

Ses amis sont revenus à Fort McMurray et ils planifient «un gros party». Elle dit qu'il y a des BBQ un peu partout en ville, où les gens se retrouvent. Jeudi, une serre prévoit distribuer gratuitement des fleurs. «Il n'y a plus de fleurs au centre-ville», dit-elle.

Les habitants retournent graduellement chez eux depuis le 1er juin.