Les fraudeurs filent entre les doigts du gouvernement fédéral, alors que certains d'entre eux parviennent à obtenir la citoyenneté canadienne même s'ils n'y ont pas droit.

Dans son rapport déposé mardi aux Communes, le vérificateur général tape sur les doigts d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, qui n'arrive pas à détecter ou prévenir la fraude de la part de ceux qui font une demande pour devenir citoyen canadien.

Les problèmes sont multiples, signale Michael Ferguson. Non seulement Ottawa peine à détecter des méthodes de fraude comme de fausses adresses de résidence ou les passeports falsifiés, mais il ne peut compter sur la Gendarmerie royale du Canada (GRC) pour le renseigner sur les crimes de certains demandeurs.

Le constat n'est pas anodin, car s'il y a fraude, c'est que des gens qui n'ont pas le droit à la citoyenneté canadienne l'obtiennent malgré tout. Et si la fraude est découverte après l'acquisition de la citoyenneté, le processus de révocation s'avère «très long et coûteux», indique le vérificateur.

Pour devenir citoyen canadien, un résident permanent doit démontrer entre autres qu'il habite bel et bien au pays depuis un certain temps et qu'il ne fait pas l'objet d'une interdiction pénale.

Le vérificateur s'est notamment penché sur un échantillon de 38 crimes - certains assez graves, comme voies de fait ou trafic de drogues - qui ont été commis par des résidents permanents ou des ressortissants étrangers tels que documentés par la GRC.

La police n'a transmis aux agents de la citoyenneté les informations nécessaires dans seulement deux de ces 38 cas. Le ministère a pu obtenir des informations d'autres façons pour la majorité des 36 cas restants, mais dans quatre cas de demandeurs, le ministère n'avait aucune idée des accusations criminelles qui pesaient contre eux. Deux de ceux-là ont fini par obtenir leur citoyenneté canadienne.

«Il est manifeste que certains demandeurs ont obtenu la citoyenneté canadienne même si des interdictions pénales auraient dû les rendre inadmissibles», écrit M. Ferguson.

Des problèmes existent également en ce qui a trait à la détection des documents falsifiés. Certains peuvent par exemple modifier les tampons ou les visas dans un passeport pour réduire le nombre de jours passés en voyage et ainsi sembler accumuler le temps nécessaire passé au Canada pour avoir le droit de devenir citoyen.

Or, les procédures à suivre par les agents pour détecter la contrefaçon ne sont ni claires ni uniformes. Résultat: «certaines personnes qui utilisent de tels documents pourraient échapper à la justice ou ne pas être inculpées», note M. Ferguson.

Les agents peinent également à détecter les fausses adresses, soit en raison d'un problème dans leur base de données, soit parce que la liste des adresses dites «problématiques» n'est pas à jour.

«Par exemple, une même adresse a été utilisée par 50 personnes pour demander la citoyenneté, mais elle n'est pas ressortie comme étant problématique, a indiqué le vérificateur. Sept de ces personnes ont obtenu la citoyenneté canadienne.»

Enfin, le manque de communication entre l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et le ministère de l'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté fait en sorte que d'autres demandes frauduleuses passent entre les mailles du filet.

Le vérificateur général recommande par ailleurs à Ottawa d'analyser en profondeur les risques de fraude et les tendances afin d'en faire la lutte de façon plus efficace.

Le ministère a accepté l'ensemble des recommandations de M. Ferguson.

En 2014, pas moins de 260 000 personnes ont obtenu la citoyenneté canadienne.