Yaman Alqadri se souvient encore des moments éprouvants qu'elle a vécus dans son pays d'origine, en Syrie, avant d'arriver au Canada en avril 2012.

La jeune femme de 22 ans a été soumise aux coups et à des chocs électriques en novembre 2011 parce qu'elle avait distribué avec ses amis des tracts contre le gouvernement de Bachar el-Assad alors qu'elle étudiait en médecine dans la capitale, à Damas.

Mme Alqadri et son petit frère sont nés en banlieue de Damas, mais la famille a déménagé en Arabie saoudite en 1996. Elle est restée dans le Royaume saoudien jusqu'à l'âge de 18 ans, lorsqu'elle a décidé de regagner son pays natal.

«Nous connaissions le gouvernement, nous étions au courant pour la corruption, mais nous n'avions pas d'appétit pour changer quoi que ce soit», a-t-elle expliqué lors d'un entretien à son appartement montréalais.

Mais au début de l'année 2011, le «Printemps arabe» a secoué les pays du Moyen-Orient et un mouvement de contestation contre le gouvernement a pris naissance à ce moment-là.

«On m'a présentée à des gens qui partageaient mes idées politiques sur le campus et nous avons commencé à organiser des manifestations à Damas», a-t-elle relaté.

«J'étais dans ces manifestations et j'ai entendu les coups de feu. J'ai couru; j'aurais pu être abattue», a-t-elle poursuivi.

Un membre du groupe a proposé de partager des dépliants contre le régime syrien. Ils ne pouvaient pas les donner sur le campus en raison des nombreuses caméras de surveillance, mais ils ont trouvé un site de construction à proximité, où ils ont lancé les papiers par les fenêtres.

Mme Alqadri s'est cachée pendant une semaine après avoir été informée qu'elle était recherchée par les autorités. Elle est finalement retournée, mais le «bras armé du régime sur le campus» l'a rapidement repérée.

Ils l'ont rouée de coups de pieds et frappée dans un bureau. Ils l'ont ensuite menottée, lui ont bandé les yeux pour l'amener «au patron» de l'organisation, qui lui a demandé pourquoi elle avait distribué ces feuillets.

Il lui a finalement infligé plusieurs chocs électriques. «Ce n'est pas une question de donner la bonne réponse, c'était pour m'apprendre une leçon», a-t-elle expliqué.

Elle a ensuite été dirigée vers une autre personne qui lui a imposé un interrogatoire plus serré. «Ils ont regardé les vidéos des manifestations sur mon téléphone et m'ont demandé si j'avais des connections, si j'étais financée par quelqu'un», a-t-elle raconté.

Sa détention de 24 jours a été fortement médiatisée, et sa mère a dû revenir en Syrie pour implorer sa libération.

Elle est finalement retournée en Arabie saoudite avec sa mère, où elle a retrouvé son père et son frère. Un cousin habitant le Canada, qui était venu la visiter, lui a proposé de venir la rejoindre, ce qu'elle a fait en avril 2012.

Elle a maintenant son statut de résidente permanente et elle espère obtenir sa citoyenneté un jour.