La saga judiciaire en Égypte du journaliste canadien Mohamed Fahmy connaîtra son point culminant jeudi prochain. Une cour égyptienne rendra son verdict en lien avec les accusations de terrorisme qui pèsent contre M. Fahmy.

En entrevue avec La Presse Canadienne, le journaliste d'origine égyptienne a dit espérer le mieux, tout en se préparant pour le pire. Il a expliqué que, «pour survivre», il se devait de rester positif, même si l'incertitude est insupportable.

M. Fahmy, qui a été libéré sous conditions en février, espère ne pas retourner derrière les barreaux, mais il reconnaît que sa cause est compliquée.

«Bien que nous soyons convaincus que nous sommes complètement innocents, nous savons aussi que ce procès est politisé et que d'autres facteurs que les preuves pourraient changer la donne. Je suis un pion dans le conflit entre l'Égypte et le Qatar», a-t-il souligné.

M. Fahmy était le chef de bureau au Caire du réseau anglophone d'Al-Jazeera - un média qatari - lorsqu'il a été arrêté, en décembre 2013, avec deux de ses collègues, l'Australien Peter Greste et l'Égyptien Baher Mohamed.

Ils ont été accusés d'avoir soutenu les Frères musulmans, une organisation liée au président déchu Mohamed Morsi qui est désormais interdite au pays. On leur avait aussi reproché d'avoir falsifié des reportages qui pourraient mettre en péril la sécurité nationale.

Ils avaient d'abord été condamnés à plusieurs années de prison, chacun, avant qu'ils ne portent leur cause en appel et qu'une cour ordonne un nouveau procès - celui qui prendra fin cette semaine.

L'Égypte et le Qatar ont des relations tendues depuis 2013, dans la foulée de la destitution, par les militaires, de l'ancien président Mohamed Morsi. Le Qatar est un allié important des Frères musulmans. Le Caire accuse ainsi Al-Jazeera d'être le porte-voix des partisans de M. Morsi - ce que réfute le réseau de télévision.

M. Fahmy estime que plusieurs conséquences pourraient émaner de ce jugement: un retour en prison, une sentence qui prendrait sa peine déjà purgée en compte ou un verdict de non-culpabilité.

Une évaluation technique de ses reportages effectuée au procès pourrait jouer en sa faveur, puisque le comité avait jugé qu'il n'y avait pas présence de matériel falsifié. Il souhaite également que ses avocats aient réussi à convaincre le juge que lui et ses collègues n'avaient aucun lien avec la confrérie musulmane.

Ce qui l'inquiète davantage, c'est que le réseau Al-Jazeera ne disposait pas des permis nécessaires pour que ses journalistes puissent travailler en Égypte. C'est d'ailleurs ce qui a mené le journaliste à poursuivre son ancien employeur.

«J'ai expliqué au juge que nous n'en avions aucune idée. Je lui ai dit qu'il devait faire la différence entre les responsabilités des journalistes et celles du réseau», a-t-il indiqué.

M. Fahmy est aussi encouragé par le fait que le gouvernement canadien semble plus sensible à sa cause. L'appui du Canada avait été remis en question par le passé alors que le journaliste australien Peter Greste avait réussi, lui, à retourner dans son pays d'origine en vertu d'une loi égyptienne permettant de déporter les criminels étrangers.

«Je crois que le gouvernement canadien et mes avocats, cette fois-ci, ont en main un plan et une stratégie solides», a-t-il indiqué, ajoutant que le Canada lui avait promis de déposer une requête de déportation et de pardon si on lui ordonnait de retourner en prison.

En entrevue avec La Presse Canadienne, la ministre d'État des Affaires consulaires Lynne Yelich s'est engagée à utiliser «tous les outils à sa disposition» pour que M. Fahmy puisse revenir au Canada.