Les Forces armées canadiennes ont un nouveau grand patron. Le chef d'état-major de la Défense, Jonathan Vance, a été assermenté lors d'une cérémonie sous haute sécurité, à Ottawa, vendredi. Il remplace ainsi le général Tom Lawson, qui a tiré sa révérence après trois ans de service.

Le général Vance avait joué un rôle important dans la mission canadienne en Afghanistan, en plus d'être l'ancien responsable du Commandement des opérations interarmées du Canada.

Comme le nouveau chef d'état-major de l'Aviation royale canadienne l'avait fait la semaine dernière, le général Vance a également profité de son discours inaugural pour dénoncer l'inconduite sexuelle dans l'armée, qui ne sera pas tolérée sous sa gouvernance, a-t-il assuré.

«Tout comportement sexuel malfaisant a toujours été et sera toujours à l'encontre du bon ordre et de la discipline. C'est une menace à la morale. C'est une menace pour la capacité opérationnelle et une menace pour cette institution», a-t-il tranché.

«Les dirigeants protègent les leurs», a-t-il poursuivi, ajoutant que, selon son expérience, les intimidateurs et les prédateurs étaient de piètres soldats au combat.

Il a fait ces commentaires quelques semaines après la parution d'un rapport de l'ancienne juge de la Cour suprême Marie Deschamps, qui avait fait état d'une inconduite sexuelle «endémique» au sein de l'armée canadienne. La juge Deschamps avait d'ailleurs dénoncé la «culture machiste» dans l'organisation militaire, blâmant au passage ses dirigeants qui auraient toléré un climat où les femmes craignent de dénoncer leurs agresseurs.

Le général Vance a indiqué qu'il se concentrerait d'abord à protéger ses troupes, et l'enjeu des agressions sexuelles figure en tête de liste, a-t-il affirmé.

«Je n'aime pas l'idée que quiconque - même une seule personne - qui doit travailler dans les Forces armées canadiennes (...) soit malade juste à penser qu'il sera attaqué, humilié ou qu'il sera dépouillé de sa dignité», a affirmé M. Vance lors d'un entretien avec La Presse Canadienne avant son assermentation.

Il a indiqué qu'il se consacrerait «personnellement et rapidement» à ce problème. Bien que le général Vance n'ait pas précisé comment il tenterait de régler ce fléau, il s'est engagé à respecter le rapport de la juge Deschamps. Il a affirmé qu'il «estimait» ses recommandations, et qu'il allait tout faire pour les respecter et même en faire davantage au besoin.

Le prédécesseur de M. Vance, Tom Lawson, avait affirmé le mois dernier, lors d'une entrevue au réseau de télévision CBC, que les soldats masculins étaient programmés «biologiquement» pour s'adonner à des inconduites sexuelles. Dans certaines notes internes, le général Lawson laissait même entendre que les recommandations du rapport Deschamps allaient rester lettre morte.

Le ministre de la Défense, Jason Kenney, a lui aussi constaté que l'inconduite sexuelle était un comportement «inacceptable». Selon lui, le général Vance est apte à «relever ce défi».

La porte-parole libérale en matière de défense, Joyce Murray, s'est réjouie du discours de M. Vance, mais selon elle, le gouvernement a une bonne part de responsabilité dans le problème.

L'idée que les dirigeants de l'armée soient indifférents aux allégations d'inconduite sexuelle est persistante auprès du public. Tant le gouvernement Harper que la Défense nationale ont été hantés par des nouvelles accablantes sur les suicides d'anciens soldats ou le traitement des anciens combattants - des enjeux qui risquent de ressurgir à la prochaine campagne électorale.

Lors de son discours, vendredi, le premier ministre Stephen Harper a d'ailleurs souligné l'importance de la continuité dans la gouvernance. Il a ensuite rendu hommage au général Lawson, qui a été chaudement applaudi par ses anciens collègues.