«Il existe au sein des Forces armées canadiennes (FAC) un problème incontestable de harcèlement sexuel et d'agression sexuelle qui nécessite une intervention directe et soutenue», conclut un rapport rendu public par la Défense nationale du Canada jeudi.

Les Forces armées ont confié à l'ancienne juge de la Cour suprême du Canada, Marie Deschamps, le mandat d'enquêter sur la situation de l'inconduite sexuelle dans ses rangs, dans la foulée d'une série de reportages médiatiques l'an dernier.  

La juge Deschamps a conclu qu'il « existe une culture sous-jacente de la sexualisation au sein des FAC. Cette culture est hostile aux femmes et aux LGTBQ et propice aux incidents graves que sont le harcèlement sexuel et l'agression sexuelle ».

Elle a recommandé un « changement culturel complet » dans les rangs militaires de même que la création d'un centre indépendant de responsabilisation en matière de harcèlement et d'agression sexuels. Les membres des FAC pourraient ainsi porter plainte auprès de ce centre pour toute situation d'inconduite.

Le chef d'état-major de la défense, le général Tom Lawson, a accepté cette dernière recommandation «en principe», c'est-à-dire qu'il s'est engagé à examiner les meilleures pratiques dans d'autres institutions et dans d'autres pratiques pour déterminer la marche à suivre pour la suite des choses.

 Cas non signalés

«Il est rapidement devenu évident au cours des séances de consultation qu'un pourcentage élevé de cas de harcèlement sexuel et d'agression sexuelle n'est pas signalé», peut-on lire dans le rapport Deschamps.

Divers facteurs expliqueraient cette absence de signalements, dont la peur de nuire à sa carrière, la crainte d'être perçu comme étant faible ou menteur ou l'impression qu'ont plusieurs militaires que le processus de traitement des plaintes ne garantit pas leur confidentialité.

Les cas qui ont été rapportés à la juge Deschamps durant son enquête pancanadienne incluent un «climat de sexualisation», particulièrement au sein des recrues. Ce climat est «caractérisé par la prolifération fréquente de jurons ou d'expressions très humiliantes faisant référence au corps des femmes, de blagues à caractère sexuel, d'insinuations ou de commentaires discriminatoires portant sur les compétences des femmes et par de attouchements sexuels non sollicités».

Des cas plus poussés ont aussi été rapportés, l'obtention de services sexuels en contrepartie de faveurs, des situations d'agressions sexuelles «dont des cas de relations douteuses entre des femmes subalternes et des hommes de grade supérieur», et de «viol par une connaissance ("date rape")».

Or, «plusieurs membres sont convaincus que les sous-officiers supérieurs imposent une culture du silence ayant pour effet de dissuader les victimes de signaler l'inconduite sexuelle», dit le rapport.

«Devant de telles attitudes, les subalternes sont nombreux à avoir l'impression que les membres de la chaîne de commandement excusent les comportements sexuels inappropriés ou qu'ils sont prêts à fermer les yeux sur les incidents qui y sont liés.»