La Défense nationale voudrait implanter un système de surveillance plus rigoureux concernant les opérations de ses agents de renseignements militaires. Or, le ministère pourrait être freiné par les coûts onéreux d'un tel programme.

Le chef du renseignement de la Défense avait ordonné la tenue d'une enquête indépendante sur le sujet, selon des documents obtenus par La Presse Canadienne en vertu de la Loi sur l'accès à l'information.

Le rapport préliminaire présente quatre recommandations, dont la meilleure serait, selon les auteurs, de créer un comité d'étude permanent et indépendant qui rendrait des comptes au ministre responsable. Il émanerait de la Loi sur les enquêtes du gouvernement fédéral.

On note toutefois qu'il serait probablement plus réaliste d'opter pour une solution édulcorée étant donné les coûts élevés d'un tel organisme de surveillance. Par exemple, il pourrait y avoir une équipe de surveillance qui enquêterait de manière ponctuelle, lorsque jugé nécessaire.

Selon les auteurs, un comité permanent «en période de restriction budgétaire» n'est peut-être pas possible parce que le gouvernement voudra probablement «éviter les coûts et les défis» d'un tel programme.

L'étude a été commandée à la suite du scandale impliquant un soldat canadien, Jeffery Delisle, qui a été reconnu coupable d'espionnage pour le compte de la Russie il y a près d'un an.

Contrairement au Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) et au Centre de sécurité des communications (CSC), aucun organisme de surveillance n'enquête sur les opérations des agents du renseignement militaire.

Depuis que les activités de l'Agence nationale de sécurité aux États-Unis ont été révélées au grand jour par un de ses anciens employés, Edward Snowden, les services de renseignement font l'objet de plusieurs débats.

Au Canada, des questions ont été soulevées sur les pouvoirs du CSC, qui pourraient d'ailleurs être élargis par le gouvernement Harper afin de mieux retracer les présumés terroristes.

Le rapport rappelle la nécessité d'instaurer un tel organisme en citant un exemple concret survenu récemment. Le ministre avait lancé une opération de renseignement, exigeant toutefois qu'une étude indépendante soit effectuée tous les 12 mois. La Défense nationale avait donc dû embaucher un consultant extérieur à trois reprises pour y arriver.

Un porte-parole du renseignement de la Défense n'a pas voulu dire clairement si le ministère allait mettre en place les recommandations.

Le capitaine Travis Smith a relevé que les activités des agents étaient déjà surveillées par leurs supérieurs immédiats. Le vérificateur général et la commissaire à la vie privée peuvent aussi s'intéresser leurs cas, selon lui.

«Toutes les activités de renseignement sont menées conformément aux lois canadiennes et internationales, en plus des politiques et des directives du ministère», a-t-il écrit dans un courriel.

Un expert des services de renseignement à l'université Simon Fraser estime que le gouvernement ne devrait pas hésiter à mettre en place un tel système de surveillance, qui pourrait aussi l'informer sur l'efficacité des opérations.

«Si vous n'avez pas un bon système de surveillance, vous dépensez votre argent», a remarqué Stuart Farson.

Les services secrets de la Défense mènent des enquêtes pour tenter de déceler les menaces contre l'armée canadienne à l'étranger et en sol canadien.

Déjà en 2009, l'ancienne vérificatrice générale du Canada, Sheila Fraser, avait déploré «qu'un des systèmes de renseignement les plus importants au pays» ne fasse pas l'objet d'un examen indépendant.