Une catastrophe s'est abattue sur des centaines de familles dans le monde, hier, quand le vol AH5017 d'Air Algérie s'est écrasé dans le nord du Mali. Et le Québec n'a pas été épargné.

Les proches d'Isabelle Prévost font partie de ceux qui ont vérifié, nerveusement, dans quel avion se trouvaient les leurs. À Sherbrooke, Danny Frappier s'est péniblement rendu à l'évidence. Sa conjointe, la mère de ses trois enfants de 5, 7 et 9 ans, était bel et bien dans l'avion qui assurait la liaison Ouagadougou-Alger.

Elle était dans cet appareil disparu des radars au-dessus du Mali en matinée, cet avion qui a plus tard été repéré dans la région malienne de Tilemsi. En pièces.

«Tout allait bien...»

«Isabelle avait appelé hier [mercredi] avant de prendre son avion. Elle avait pu parler avec ses enfants. L'appel a été court, mais tout allait bien, a raconté M. Frappier. J'étais rassuré. Le voyage s'était bien passé. Il n'y avait pas eu de maladie pendant son séjour en Afrique. Ç'aurait pu arriver», a-t-il ajouté.

Danny Frappier était resté à Sherbrooke avec les deux filles et le garçon du couple, parce qu'Isabelle Prévost, originaire de La Patrie, était partie au Burkina Faso avec des amis de Longueuil.

Une mère ses enfants

Dans cette ville de la Rive-Sud de Montréal, le constat a été aussi brutal qu'en Estrie. Winmalo Somda, sa conjointe Angélique et leurs enfants, Nathanael et Arielle, avaient mis le cap sur le Burkina Faso le 14 juillet dernier. Ils étaient accompagnés d'Isabelle Prévost et du frère de M. Somda, Wilfred, qui n'a pas de résidence permanente au pays.

Depuis deux ans, les parents et amis se préparaient pour une grande fête au Burkina Faso. Les parents des frères Somda célébraient leur cinquantième anniversaire de mariage. Seule la conjointe de Wilfred n'était pas du voyage. Elle est restée au pays parce qu'elle attend un bébé. Un deuxième enfant, qui grandira sans son papa. Mais avec toute une communauté derrière lui.

«Nous nous préparons pour une veillée», a expliqué hier un ami de la famille, Mamadou Sawadogo. Comme d'autres, il ne connaissait pas beaucoup les Somda. «Mais ce sont des amis, des frères, parce qu'ils font partie de ma communauté, a-t-il dit. On est sous le choc. On s'organise pour pouvoir prendre soin d'elle [la conjointe de Wilfred Somda] et s'en occuper.»

Un homme de Gatineau perd sa famille

À Gatineau, un technologue de l'hôpital de Buckingham a perdu sa femme et ses deux enfants. Mamadou Zoungrana préparait depuis deux ans l'arrivée des siens au Québec. Il attendait ce grand moment, quand la famille allait enfin être réunie. Les choses se sont finalement passées autrement, a confirmé l'une de ses collègues.

«C'est le vol 5017», a-t-il confirmé, en entrevue à Radio-Canada. M. Zoungrana sait que ses proches étaient dans le vol maudit; il l'avait lui-même réservé pour eux.

«Hier soir, on s'est parlé. Quand j'ai vu les informations, ça correspondait très sûrement à leur avion», a-t-il laissé tomber. Le technologue est presque convaincu d'avoir perdu sa famille, mais il cultive quand même un peu d'espérance.

«J'ai espoir parce que jusqu'à présent, je n'arrive pas à me faire à l'idée que toute ma famille est partie comme ça, a-t-il dit. Je ne peux pas me mettre en tête que ma famille, du moment où ils sont censés venir me rejoindre, leur avion s'écrase.»

La cause de l'accident qui a gâché les projets de M. Zoungrana demeure inconnue. L'avion d'Air Algérie a décollé de la capitale du Burkina Faso, Ouagadougou, hier matin à 1h17, heure locale. Il devait atterrir à Alger à 7h10 le matin même. À 1h38, heure locale, l'avion a modifié son itinéraire en raison de la «visibilité nulle» et des «orages», selon Air Algérie. Les autorités aériennes ont perdu la trace de l'avion à 1h55, un MD83 affrété à la compagnie aérienne espagnole Swiftair.

Quelques heures plus tard, un tweet d'Air Algérie est venu confirmer le pire. «Toutes nos pensées reviennent aux passagers du vol AH5017 et aux familles des victimes. Air Algérie présente toutes ses sincères condoléances», a écrit le transporteur, pendant que l'onde de choc créée par l'événement atteignait les familles, une à une.

Il s'agit de la troisième catastrophe aérienne depuis une semaine, après celles de l'Ukraine et de Taïwan.

- Avec Vincent Brousseau-Pouliot, La Presse, et Claude Plante, La Tribune

PHOTO ÉTIENNE RANGER, LA PRESSE

Kouliga Zoungrana et Jean-Bernard Noali sont venus épauler leur ami Mamadou Zoungrana.

- Vincent Brousseau-Pouliot et Hugo de Grandpré