Le chef d'état-major des Forces armées canadiennes a reconnu hier qu'il est troublé par l'ampleur du problème des agressions sexuelles dans ses rangs. Il a donc confirmé la mise sur pied d'une vérification externe pour faire la lumière sur la situation.

Devant un comité parlementaire chargé de faire la lumière sur le problème, le général Tom Lawson a dénoncé les gestes «odieux et répugnants» qu'a révélés une enquête de L'actualité publiée le mois dernier.

Citant plusieurs témoignages, le magazine avance que, chaque jour, en moyenne, cinq personnes sont victimes d'une agression sexuelle dans la communauté militaire canadienne. Le général Lawson n'a pas contredit ces chiffres.

«D'aucune façon je n'accepterai que nos confrères et consoeurs de combat soient trahis par les leurs», a affirmé le général Lawson aux parlementaires.

«Obstacles systémiques»

Il affirme qu'une enquête interne a permis de dégager des «obstacles systémiques» qui font que les victimes hésitent à dénoncer leur agresseur: elles ont peur des représailles si elles dénoncent un collègue ou un supérieur hiérarchique.

La situation s'est améliorée depuis quelques années, a-t-il dit, sur la foi de témoignages rendus sous le couvert de l'anonymat.

«Nous avons mis en place plusieurs mécanismes qui ont permis de réduire la fréquence de ces cas, mais ce n'est pas suffisant, a dit le général Lawson en point de presse. Nous devons faciliter le processus pour ceux qui se sentent victimes et qui souhaitent le dénoncer, nous assurer qu'ils sont protégés.»

Les cas d'agression sexuelle ne suivent pas un modèle précis, a indiqué le général, mais l'abus d'alcool contribue au fléau.

M. Lawson entend confier l'enquête à un organisme externe, mais il n'a pas encore déterminé quel sera son mandat.

Tous les partis sont inquiets

Les députés du Parti conservateur, du Nouveau Parti démocratique et du Parti libéral n'ont ménagé aucune question au général, un rare moment où la partisanerie qui caractérise les débats a été laissée de côté.

N'empêche, les explications du général Lawson n'ont pas convaincu les experts.

Le colonel à la retraite Michel Drapeau, qui a assisté au témoignage du général, lui reproche de défendre le «statu quo». Selon lui, c'est la police civile, et non la police militaire, qui devrait enquêter sur les cas d'agression sexuelle dans l'armée.

Ils ont dit

«L'inconduite sexuelle n'a pas sa place dans les Forces armées canadiennes, et aucun membre ne devrait jamais être soumis à ce comportement inacceptable.»

- Johanna Quinney, porte-parole du ministre de la Défense, Rob Nicholson, lequel promet de rendre publics les rapports internes sur les agressions sexuelles dès qu'il les recevra.

«Il y a un gros problème d'agressions sexuelles dans l'armée; qu'on le règle. Mais la manière de le régler, ce n'est pas de le garder encore en catimini, parce qu'on va encore avoir un incitatif de garder ça secret.»

- Thomas Mulcair, chef du Nouveau Parti démocratique, qui souhaite que le processus d'accusation des soldats impliqués dans des affaires d'agression sexuelle soit ouvert.

«Il y a une crainte de représailles. Ça ne va pas disparaître, à moins qu'il y ait un rebrassage complet de cette organisation. C'est peut-être ce que cette enquête externe va vous montrer.»

- Judy Sgro, députée du Parti libéral. Elle se dit «triste» et «furieuse» devant les cas répétés d'agression sexuelle dans l'armée et dans la Gendarmerie royale du Canada.