Les témoignages livrés devant la commission Charbonneau depuis deux ans ont servi de tremplin au syndic de l'Ordre des ingénieurs, qui a ouvert pas moins de 180 enquêtes sur les agissements de ses membres montrés du doigt lors des audiences publiques. Pour répondre au flot de plaintes pour collusion, corruption et contributions politiques illégales, le syndic a plus que doublé le nombre de ses employés.

Pour l'instant, seulement cinq ingénieurs municipaux sont traduits devant le conseil de discipline. «La plupart des enquêtes sont encore en cours», a expliqué Aline Vandermeer, conseillère en communications à l'Ordre des ingénieurs. «Compte tenu de la Loi sur les commissions d'enquête, on ne peut pas utiliser ce qui s'est dit en preuve. Nous devons refaire nos propres enquêtes.»

Jusqu'en 2009, le syndic se penchait presque exclusivement sur les plaintes de fautes techniques. Mais la multiplication des reportages et des perquisitions dans les grandes firmes de génie a poussé le syndic à enquêter sur les dossiers «3C» - pour collusion, corruption et contributions politiques illégales. Le nombre d'enquêtes «3C» actuellement en cours s'élève à 507. De ce nombre, 180 découlent directement d'allégations faites devant la Commission.

Explosion des enquêtes

À l'automne 2012, l'Ordre des ingénieurs a mandaté son syndic pour enquêter sur les ingénieurs mis en cause devant la Commission. Mais c'est à partir de 2009 que le nombre d'enquêtes a véritablement explosé, lorsque l'intégrité des ingénieurs est devenue un sujet d'actualité.

En 2008-2009, le syndic a ouvert 80 enquêtes, alors que l'année suivante, ce chiffre a grimpé à 488.

«Nous avons dû revoir nos façons de travailler, il a vraiment fallu s'adapter», explique Mme Vandermeer. «L'effectif du Bureau du syndic a doublé au cours des dernières années, passant d'une petite quinzaine en 2008-2009 à plus d'une trentaine aujourd'hui.»

Les cinq ingénieurs traduits devant le conseil de discipline sont tous issus du milieu municipal. Il s'agit de Robert Marcil, Luc Leclerc, Gilles P. Vézina, Claudio Balliana et André Lebeuf. Les quatre premiers étaient employés de la Ville de Montréal, alors que le dernier travaillait pour la Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu. On leur reproche notamment d'avoir accepté des avantages ou des cadeaux et d'avoir manqué d'intégrité.

La semaine dernière, Robert Marcil, ancien directeur des travaux publics de la Ville de Montréal, a plaidé coupable à quatre infractions à son code de déontologie. Il a admis avoir commis une erreur de jugement en se faisant payer un voyage de luxe en Italie par l'entrepreneur Joe Borselino. Le président de Construction Garnier lui avait offert ce cadeau, évalué à 50 000$, peu après avoir obtenu sans appel d'offres un contrat de 5,2 millions à la Ville de Montréal. Sa sanction n'a pas encore été fixée.

Dans une affaire de pots-de-vin, Claudio Balliana a écopé d'une radiation de 18 mois.

Les autres causes sont pendantes.