Même si elle constate que certaines situations plaçaient les travailleurs en situation de risque, aucun constat d'infraction n'a été donné par la Commission de la santé et de la sécurité du travail du Québec (CSST) à l'employeur de deux femmes qui ont trouvé la mort dans le terrible incendie d'un entrepôt de pièces pyrotechniques, à Côteau-du-Lac, le 20 juin 2013.

Ce matin-là, une explosion d'une intensité telle que des résidants de plusieurs dizaines de kilomètres à la ronde affirment avoir ressenti un tremblement. Le feu s'était propagé aux entrepôts adjacents, et avait fait rage pendant des heures, les feux multicolores éclatant au-dessus de la tête des pompiers.

Les flammes ont pris naissance dans l'entrepôt M-5 de l'entreprise BEM Souvenirs et Feux d'artifice, qui vend des pièces pyrotechniques autant au grand public qu'aux organisateurs de grands spectacles.

Aucune cause formelle n'a été identifiée pour expliquer la mort des employées Nicole Brisson et Françoise Lacroix, qui s'affairaient au classement et au rangement de pièces de type professionnel.

«Il n'y a pas de constat d'infraction émis pour l'instant. Les seuls témoins sont décédés et les lieux ont été tellement détruits qu'établir des causes claires devient difficile. Nous émettons un rapport à titre préventif pour que des entreprises similaires puissent en tirer des leçons et apporter des correctifs, s'il y a lieu», explique Claudia Matteau, porte-parole de la CSST.

Les causes probables:

> Appareils électriques non conformes

Le bâtiment M-5 était équipé de deux appareils de chauffage électrique situés près du plafond et un moteur servant à ouvrir les portes de garage.

«Ces appareillages électriques ne sont pas conçus pour être antidéflagrants. En cas de défectuosité, les appareils peuvent créer des étincelles qui, en contact avec de la poudre noire, peuvent amorcer la mèche d'une pièce pyrotechnique et la faire exploser», lit-on dans le rapport. La période estivale est la plus occupée pour l'entreprise. Jusqu'à 50 000 kg de pièces pyrotechniques professionnelles pouvaient se trouver dans le M-5.

De plus, la Division de la réglementation des explosifs de Ressources naturelles Canada avait déclaré ces dispositifs comme étant non conformes lors d'une inspection un an plus tôt.

> Présence d'outils ferreux

«Des outils ferreux étaient habituellement utilisés dans le bâtiment M-5 pour différentes tâches. Un marteau en acier, une paire de pinces en acier, des agrafeuses en métal et des couteaux à lame métallique rétractable sont notamment retrouvés dans les décombres du bâtiment M-5. Les outils ferreux peuvent créer des étincelles lorsqu'ils entrent en contact avec une autre pièce métallique. Une étincelle peut amorcer la poudre noire d'une mèche d'une pièce pyrotechnique et la faire exploser. Le règlement sur les explosifs interdit d'apporter du fer et de l'acier dans un dépôt d'explosif», stipule le rapport.

> Pièces pyrotechniques préamorcées

«Le jour de l'événement, plusieurs boîtes de pièces pyrotechniques préamorcées sont retrouvées dans des camions stationnés entre le M-5 et le M-6. Selon les informations recueillies, les pièces préamorcées étaient prêtes à être livrées sur les sites de spectacles ou entreposées temporairement», dit la CSST, qui juge ces pièces moins stables que les autres en cas de chute de l'une d'elles au dol. Les pièces doivent être préamorcées sur le site de leur lancement, et non au site d'entreposage, déplore la CSST.

> Pièce pyrotechnique échappée

«Le jour de l'événement, les deux travailleuses manipulent des dizaines de pièces pyrotechniques lors des activités de préparation d'assortiments et de remisage. [...] Une pièce pyrotechnique manipulée peut être échappée pour tomber directement sur sa chasse ou sur sa comète au sol. Au contact, la pièce s'amorce et explose entraînant ainsi une cascade d'explosion», suppose la CSST.

> Friction d'une mèche

«Les pièces pyrotechniques sont placées dans les casiers avec les mèches vers l'ouverture. Une travailleuse peut y poser le pied et y ajouter son poids créant ainsi une friction capable d'amorcer la mèche», selon le rapport.